Inhibition des réponses immunitaires induites après transfert de gène par vecteur AAV recombinant : preuve de concept de l'efficacité prophylactique de la tolérisation orale dans un modèle murin
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La thérapie génique permet d'envisager de nouvelles solutions thérapeutique dans diverses pathologies telles que les cancers, les maladies monogéniques ou bien encore les infections. Cette approche thérapeutique s'effectue par la transduction de cellules cibles, le plus couramment par le biais de vecteurs viraux. Parmi ces vecteurs, les vecteurs viraux adéno-associés recombinants (rAAV) se sont imposés au fil des études précliniques chez l'animal et des essais cliniques chez l'homme comme un vecteur de choix. Ils offrent en effet de nombreux avantages. Ils sont dérivés de virus non pathogènes, ce qui facilite leur manipulation. Ils sont considérés comme non intégratifs au sein du génome hôte et donc peu susceptibles de promouvoir la tumorogénicité par mutagénèse intentionnelle. Enfin, ils s'avèrent moins immunogènes et moins inflammatoires que d'autres vecteurs viraux tels que les adénovirus. Plus de vingt-cinq ans après le premier essai clinique approuvé chez l'homme, la thérapie génique a connu une histoire tumultueuse, entre les échecs de ses débuts et de grandes avancées menant à des succès thérapeutiques et à la mise sur le marché européen d'un médicament (alipogene tiparvovec). Cependant, l'efficacité de cette approche thérapeutique se heurte encore à de nombreuses limites, qui ne permettent de la qualifier que de prometteuse pour la plupart des patients. Parmi ces limites, l'immunogénicité des vecteurs viraux entrave fortement l'efficacité sur le long terme de la thérapie génique au travers notamment de réponses immunitaires dirigées contre le vecteur et/ou la protéine transgénique. Outre les réponses immunitaires dirigées contre les protéines de la capside, largement documentées, le transgène encapsidé dans le vecteur permet l'expression d'une protéine d'intérêt thérapeutique qui peut elle-même s'avérer immunogène. En effet, en fonction du profil mutationnel à l'origine de la pathologie monogénique, la protéine transgénique peut représenter un néo-antigène et engendrer des réponses immunitaires susceptibles de conduire à l'élimination des cellules transduites. Des traitements immunosuppresseurs systémiques sont utilisés en clinique pour prévenir ces réponses indésirables, mais leur utilisation est connue pour augmenter le risque infectieux et le développement de cancers. Ainsi, des stratégies permettant plutôt d'induire une tolérance immunologique spécifique de la protéine transgénique permettrait d'améliorer l'expression à long terme de la protéine thérapeutique sans fragiliser de manière globale le système immunitaire du patient. L'objectif de ce travail de thèse était d'évaluer dans un modèle murin une telle stratégie reposant sur la tolérisation orale vis-à-vis de la protéine transgénique. La tolérisation orale permet en effet de prévenir l'apparition de réponses immunitaires dirigées contre des antigènes ingérés par voie orale. Dans notre modèle murin d'étude, basé sur l'injection intramusculaire et fortement immunogène d'un vecteur rAAV codant pour l'ovalbumine (Ova), l'administration prophylactique d'Ova diluée dans l'eau de boisson des animaux durant les sept jours précédant ou les dix jours suivant l'injection du vecteur a permis de prévenir totalement les réponses immunitaires dirigées contre la protéine transgénique. L'absence de réponse, aussi bien humorale que cellulaire, a été corrélée à une persistance à long-terme du transgène dans les cellules musculaires transduites ainsi qu'à sa production et sa sécrétion dans le sérum des animaux ainsi traités. L'exploration des mécanismes immunologiques de cette tolérisation a permis de mettre en évidence l'induction d'un état d'anergie des lymphocytes T CD8+ spécifiques de l'Ova durant la phase initiale de tolérisation orale, précédant l'injection du vecteur rAAV-Ova. De manière intéressante, ces cellules sont ensuite délétées du répertoire lymphocytaire suite à l'injection du vecteur rAAV-Ova et à leur réexposition avec l'Ova dans le contexte mimant une thérapie génique musculaire. Ainsi, ce travail a permis d'apporter la preuve de concept de l'efficacité de la tolérisation orale prophylactique vis-à-vis de la protéine transgénique dans le contexte du transfert musculaire de gène par vecteur rAAV. Cette approche pourrait permettre d'envisager, chez certains patients présentant un risque élevé de s'immuniser contre la protéine transgénique, un protocole de tolérisation spécifique de la protéine d'intérêt. Cette stratégie pourrait ainsi améliorer l'expression sur le long terme de la protéine transgénique sans entraver l'ensemble des défenses immunitaires.