L' interposition médiatique dans les pays en conflit : l'exemple de la radio onusienne dans le conflit ivoirien
Institution:
Bordeaux 3Disciplines:
Directors:
Abstract EN:
En Côte d’Ivoire, les différentes crises sociopolitiques et militaires qui secouent le pays depuis la mort du premier président Félix HOUPHOUËT-BOIGNY (1905-1993) ont mis à nue la responsabilité des politiques et des médias. Dans une posture de connivence (médias et politique), la presse ivoirienne a délaissé son rôle premier d’information et de contre-pouvoir pour glisser facilement sur le terrain politique, lui-même conflictuel, haineux et particulièrement violent. En produisant des effets non prévus, dominés par les appels à la haine, la division, le rejet et la violence, les médias ivoiriens ont propagé et inoculé le poison contagieux des conflits armés. Ainsi, le coup d’État manqué de septembre 2002 qui s’est par la suite mué en rébellion armée a facilement trouvé des relais dans les médias ivoiriens. Mais, dans la quête d’une paix durable en Côte d’Ivoire, l’ONU a voulu via sa propre radio (ONUCI-FM) engager une interposition médiatique afin d’inverser le rôle des médias sur le terrain du conflit. Pour l’Institution, garante du processus de paix, il faut faire des médias de masse, un acteur prépondérant dans la diffusion de la pensée positive. Cette thèse revient donc sur la problématique du journalisme de paix et de son rôle dans la résolution des conflits armés. Elle permet ainsi de reformuler la question du journalisme de paix en Côte d’Ivoire comme suit : Comment est-il possible, à travers la radio onusienne, de faire un journalisme de qualité, de faire oublier les rancœurs, les injustices, les haines, les frustrations, de tuer les vengeances et d’aider les Ivoiriens à se réconcilier, à aller à la paix ? Le journalisme de qualité, libre et indépendant, acteur d’émancipation et de paix est ainsi placé au centre de cette recherche. Mais dans cette thèse, la radio onusienne n’est pas envisagée avec euphorisme et enthousiasme comme souvent et partout ailleurs. Elle n’est pas envisagée non plus à l’éclairage de son rôle souhaité mais à l’éclairage de son rôle réel, effectif et quotidien tout le long du processus de sortie de crise. Cette approche met l’accent sur la manière dont l’interposition médiatique peut s’articuler avec le conflit politico-militaire. La radio ONUCI-FM a été le principal média d’étude au titre de sa noble mission de paix. Cette recherche a été menée en Côte d’Ivoire aussi bien dans les zones contrôlées par l’ex-rébellion (Forces Nouvelles) que dans les zones tenues par le régime de l’ancien président ivoirien Laurent GBAGBO. Elle conclut à l’inévitable contrôle, voire l’instrumentalisation des médias même sous le couvert de la paix et de la démocratie.
Abstract FR:
The different sociopolitical and military crises that have hit Ivory Coast since the death of the country’s first president Félix HOUPHOUËT-BOIGNY (1905-1993) exposed the responsibility of the politicians and the media. Stuck in their connivance (media and politics), the Ivoirian press abandoned its primary role of information and anti-establishment force to interfere easily with the political arena which is itself particularly violent, full of conflicts and hatred. By producing unplanned effects which are controlled by a series of calls to hatred, division, rejection and violence, the Ivorian media spread and inoculated the infectious poison of armed conflicts. Thus, the attempt coup of September 2002 which subsequently turned into a rebellion naturally found supports in the Ivoirian media. But in search of lasting peace in Ivory Coast via its own radio station, the United Nations aimed at starting a media interposition in order to reverse the role of the media on the conflict zone. For this Institution in charge of guaranteeing the peace process it is necessary to make the mass media a major player in the broadcasting of positive thinking. This doctoral dissertation goes back over the question of peace journalism and its role in armed conflicts resolution. It allows rephrasing the question of peace journalism in Ivory Coast as follows: How is it possible to be a skilled journalist and make forget resentments, injustice, hatred, frustrationas well as fight against revenge and help the Ivorians to reconcile and get to peace? Skilled journalism, free and independent and at the same time factor of emancipation and peace is then in the centre of this research. But in this thesis, the United Nations’ radio station is not considered with euphoria and enthusiasm as it is often the case everywhere else. It is neither examined through its desired role, but rather in the light of its actual task throughout the daily management of the peace process. This approach emphasizes the way media interposition can be articulated with a military and political conflict. Seen in its worthy peace mission, the ONUCI-FM radio was the principal media of this study. The research was carried out in Ivory Coast and precisely in the parts of the country controlled by the former rebels of the Forces Nouvelles as well as the areas under control of the regime of the former president Laurent Gbagbo.