Vivre à crédit : pauvreté, économie et usages du droit dans un grand ensemble à Buenos Aires
Institution:
Paris 7Disciplines:
Directors:
Abstract EN:
Based on a three-year research in a social housing neighborhood in Buenos Aires that hosts 20,000 dwellers, this paper studies the linkages between the economy, the legal system and the interpersonal relationships upon which depends the daily economy of the households, through a singular methodology that combines observations in situ, interviews with dwellers of the neighborhood and public officials, statistical data, private correspondence, household budgets, and administrative files. While in the 1970s there was an attempt to property rights to all the citizens, 30 years later, there exists a wide range of tenure status which threats the public interventions. The debt is at the core of this market's structure. "To live on credit" means that the debts are a structural pièce of information. " To live on credit" means that the relationships oscillate between the contract and the violence, trust and threaten. Here, the deals attempt to consolidate the exchanges and guarantee the obligations, supported by behavioral mottos and uses of the law. To inherit a bequest outside the family, to sell or lend, to legitimately squatter a property, to go over the public service offices or request assistantship to the National President, are ail activities that indicate how the law guides the ways of thinking and acting, in its multiple branches, at the same time civil, penal and social.
Abstract FR:
Comment vit-on dans la pauvreté ? Comment assurer le vivre et le couvert ? Comment éviter la violence ? Comment combiner la protection familiale et la protection sociale ? A partir d'une enquête ethnographique dans un Grand Ensemble de Buenos Aires, la thèse explore ces questions en utilisant plusieurs matériaux : des observations, des entretiens, des correspondances, des archives personnelles et administratives. Pour répondre à l'appauvrissement économique, les politiques du logement ont développé un programme d'accès à la propriété. Mais les propriétaires sont peu nombreux, l'enquête découvre un ensemble hiérarchisé de statuts d'occupation, du locataire au sous locataire jusqu'au squatteur, en passant par l'hébergé, cette figure des recompositions familiales et des réseaux mouvants de sociabilité. Une économie de l'aléatoire apparait et redéfinit les relations d'argent et de travail, lesrelations locatives, les liens de parentés, au fondement des « caisses communes ». Tout circule, des ressources matérielles contre une prise en charge, des corvées contre de l'hébergement, des services contre des promesses d'héritage. « Rester en compte », éviter la misère, constituer des réserves, augmenter sa réputation : « vivre à crédit » est ici une donnée structurelle. Si la violence de la dette affleure, les pactes seront là pour offrir une certaine stabilité sur le modèle des contrats civils, soit tout un travail sur la légalité, une fabrique des usages, une morale de l'occupation portée par les voisins, les responsables d'immeubles, les assistantes sociales. Ces pratiques débouchent sur des passes du droit face aux administrations, rejoignant ainsi la signification originaire du droit social. La thèse montre ainsi que les politiques sociales, c'est-à-dire « la pauvreté saisie par le droit », se heurtent sans cesse à la recherche obstinée par les habitants d'une légitimité, comme une inversion où « le droit est saisi par la pauvreté ».