L'autonomie reproductive au Costa Rica et au Nicaragua : un talon d’Achille dans le processus de laïcisation
Institution:
Paris, EHESSDisciplines:
Directors:
Abstract EN:
How to explain the continued restrictions on women's reproductive autonomy which prevails in Costa Rica and Nicaragua? To answer this question, which remains more than ever, this thesis interrogates the consequences of the influence of the Catholic Church on the establishment of symbolic boundaries inside of which were built the Nations-States of Costa Rica and Nicaragua. The maintenance until today of the elective affinity between political and religious authorities has hampered attempts to secularization of these countries: each crossed threshold of secularization was succeeded by a threshold of confessionalization which has taken issue extensively for women's rights. If these rights are ultimately passed from religious control to state control, the secularization process remains incomplete, preventing the emergence of a recognized status of women's freedom to dispose of themselves. States take possession of Christian morality to confiscate their body, even if Nicaragua became secular while Costa Rica remains confessional. This lawlessness is reinforced by the appearance and rapid growth of Evangelical Churches that are supporting the Catholic Church in the political arena with the electoral participation of Pentecostals parties. These religious communities find a common goal about the defense of the "right to life of the unborn" with the emergence of sexual and reproductive rights. They join forces to fight against the access to therapeutic abortion, morning-after pill and in vitro fertilization. This alliance is bearing fruit: therapeutic abortion in Nicaragua is prohibited while the morning-after pill and in vitro fertilization are condemned in Costa Rica.
Abstract FR:
Comment expliquer le maintien des restrictions à l’autonomie reproductive des femmes qui prévaut au Costa Rica et au Nicaragua ? Pour répondre à cette question qui demeure plus que jamais d’actualité, cette thèse interroge les conséquences de l'influence de l'Église catholique sur l’établissement des frontières symboliques à l’intérieur desquelles se sont construits les États-nations costariciens et nicaraguayens. Le maintien, jusqu’à aujourd’hui, de l’affinité élective entre les autorités politiques et religieuses a nui aux tentatives de laïcisation de ces pays : à chaque seuil de laïcisation franchi a succédé un seuil de confessionnalisation qui a pris très largement pour enjeu les droits des femmes. Si ces droits sont finalement passés du contrôle religieux au contrôle étatique, le processus de sécularisation reste inachevé, empêchant l’avènement d’un statut de la femme reconnue dans sa liberté à disposer d’elle-même. Les États s’emparent de la morale chrétienne pour confisquer son corps, même si le Nicaragua est devenu laïc tandis que le Costa Rica demeure confessionnel. Cette situation de non-droit est renforcée par l’apparition et le développement rapide des Églises évangéliques qui viennent soutenir l'Église catholique sur le terrain politique grâce à la participation électorale des partis pentecôtistes. Ces communautés religieuses par ailleurs concurrentes trouvent un terrain d’entente autour de la défense du « droit à la vie du non-né » et face à l’émergence des droits sexuels et reproductifs. Elles s’allient pour lutter contre l’accès à l’avortement thérapeutique, à la pilule du lendemain et à la fertilisation in vitro. Cette alliance porte ses fruits : l’avortement thérapeutique est interdit au Nicaragua tandis que la pilule du lendemain et la fertilisation in vitro sont condamnées au Costa Rica. Le populisme, la juridicisation du politique et la resacralisation de « l’ordre naturel » dans les lois, transforment le non-né en sujet de droit, au détriment des droits acquis par les femmes. La laïcité est considérée comme une valeur minoritaire. Elle menace l’identité de la communauté de citoyens et remet en question le ciment chrétien des imaginaires nationaux.