Qu'offre la demande ? : socio-économie d'une innovation par l'usager
Institution:
Toulouse 2Disciplines:
Directors:
Abstract EN:
Product and service users often take part to innovation. They are, at varying degrees, involved in design operations that contribute to give birth to new technological devices. For instance, they occasionally reinterpret “scripts” established by professionals for their own use. Adoption of a technological object reclaims its adaptation. Our research aims to determine how users become autoproducers thereby translating their needs by themselves. The rise of the user to the rank of designer leads to rethinking various socioeconomic issues such as the division of labour between amateurs and professionals, the definition of the terms of common framework between community and market, the importance of technical cooperation between these two worlds — which are generally thought to be separated —, and last but not least the social mobility of “hacktivists”. Our study focuses on Western wireless communities. Mainly led by groups of skilful enthusiasts, these communities try to find a way to democratize access to digital services, notably Internet. They have to build their own network infrastructure for that. Wifi activists want to free themselves from the hegemony of companies and intend to provide people with a low-cost citizen service based on a collective governance of technology.
Abstract FR:
Les acteurs de la demande prennent souvent part à la définition de l’offre. Leur présence au cœur du processus d'innovation industriel est évidente et ce qu'ils y soient simples objets de représentation, objets d'étude ou partenaires actifs. Les usagers sont donc, à différents degrés, impliqués dans la phase de conception des biens et services marchands. Une fois ces biens et services mis en vente, les usagers continuent de les modeler à leur convenance. Ils réinterprètent à l'occasion les « scripts » de fonctionnement et d'usage établis ex ante par les professionnels de l'offre. « Bricolages » et « détournements » accompagnent donc l'adoption de tout objet technique. Ainsi, les usagers font montre d'une certaine faculté d'émancipation à l'égard des prescriptions de l'offre. Émancipation pouvant être totale si et seulement si les usagers deviennent par eux-mêmes autoproducteurs des biens et services dont ils souhaitent jouir. Tel est le point de départ de notre travail de recherche qui s'inscrit dans le prolongement des récentes études portant sur l' « innovation faite par et pour les usagers ». L'élévation de l'usager au rang de concepteur induit un questionnement d'ordre socio-économique sur la division du travail de recherche et développement entre les entités communautaires et marchandes et, par conséquent, sur la cohabitation de solutions libres et propriétaires. La thèse que nous développons ici consiste à dépasser l'antagonisme apparent entre communauté et marché pour rendre compte des liens multiples unissant usagers-innovateurs et professionnels du domaine. Nous défendons l'idée selon laquelle les frontières entre ces deux mondes antagoniques sont poreuses, perméables aux échanges transversaux. Nous déplaçant des coopérations techniques et aménagements commerciaux à la redéfinition des modes de mobilité professionnelle, nous irons à la découverte des lieux d'échange entre ces demandeurs qui offrent et ces offreurs devenus co-offreurs. Notre étude porte sur les communautés wifi occidentales. Il s'agit de communautés animées par des passionnés d'informatique visant la construction d'une infrastructure réseau sans-fil. À l'instar de l'Open Source Software Movement, cherchant à sortir d'une logique propriétaire de création et distribution logicielle, l'Open Infrastructure Movement se tourne vers la démocratisation de l'accès à Internet et à l'interconnexion numérique libre. Les usagers-innovateurs, membres des communautés wifi, désirent s'affranchir de l'hégémonie marchande dans le domaine et, par une gouvernance collective, s'organisent afin de délivrer un service citoyen à très bas coût. Rencontrer ces usagers-innovateurs sans-filistes c'est — en somme — aller demander à la demande ce qu'elle offre de plus que l'offre.