Abstract FR:

Le présent travail vise à caractériser le marché du livre de seconde main du point de vue de la sociologie économique. Il s’intéresse in fine aux relations sociales impliquées sur ce marché rendu particulier par l'objet de l'échange, le livre. Ce dernier, considéré ici comme un actant à part entière, connaît en effet une mise en place marchande rendue problématique par son ambivalence issue d'une histoire riche, qui en fait un objet de débats passionnés et de passion dévorante. Ses multiples facettes en font une marchandise multiple à la qualité variable qui possède la spécificité de porter, imprimés à même son corps, les dispositifs d'une première vie marchande. Cet état de fait impose aux professionnels opérant sur ce marché d'adapter ou d'élaborer de multiples dispositifs propres à capter la clientèle, ce qui implique entre autres d'instaurer un climat de confiance. La mise en place de ces dispositifs passe par l'assimilation et la (re)construction à la fois individuelle et collective de savoirs, savoir-faire et savoir-être propres à la profession, notamment en termes de passion, de médiation et de travail relationnel. Les acheteurs (au moins potentiels) de livres de seconde main mobilisent cet ensemble de dispositifs pour effectuer leurs choix. Sur un fond ontologique commun aux figures du client génériques, leur activité remarquable consiste à s'ajuster d'une part à la marchandise disponible et d'autre part au(x) marchand(s) qu'ils sélectionnent. Les ajustements de l'offre à la demande et de la demande à l'offre sont au fondement des appariements marchands qui passent par des échanges impersonnels ou personnalisés sur un marché où les liens sont en constante redéfinition. Les relations sociales (marchandes) se trouvent alors au cœur du marché, dans la création de la valeur comme dans ses régulations autonomes.