Abstract FR:

Le théâtre se caractérise par un processus de rationalisation (Max Weber). D'une part, il existe une autonomisation de cet espace avec la constitution de la mise en scène comme enjeu spécifique. Cette autonomisation s'impose au prix de la disqualification du théâtre populaire et, en raison des caractéristiques matérielles de la représentation théâtrale, l'intervention publique en constitue la condition économique. Il existe alors, parmi les professionnels, une véritable demande d'état qui se traduit par l'acceptation de l'activité classificatrice et organisationnelle de celui-ci. D'autre part, il résulte de ce double trait une division croissante du travail qui a plusieurs propriétés. Il existe, d'abord, une intellectualisation croissante de l'activité théâtrale. Ensuite, la nécessité de nouvelles compétences conduit à l'émergence de nouveaux postes : dramaturges ; administrateurs. Le metteur en scène occupe la place centrale en combinant compétences et modes d'intervention artistique, administratif et politique. Cette division du travail et la maitrise inégale du processus de rationalisation déterminent des divisions et des conflits violents entre une minorité de professionnels concentrant l'essentiel des gratifications matérielles et symboliques et une grande majorité à la limite de la survie économique. A l'opposé de ce processus de rationalisation, la troupe de théâtre constitue l'incarnation d'un idéal communautaire où prédominent les relations affectives et une organisation précapitaliste. Au sein de cette communauté, l'autorité de type charismatique de quelques metteurs en scène (Copeau, Vilar, Mnouchkine) repose sur le caractère exemplaire et multiforme de leurs sacrifices.