thesis

Autochtonie et modernité : l'expérience des Innus au Canada

Defense date:

Jan. 1, 2012

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Institution:

Paris, EHESS

Disciplines:

Directors:

Abstract EN:

The concept of modernity is intrinsically based on a break marking the boundary between modern society and the past. Indigenous peoples thus represent a real test case for social scientists who were able to observe in situ the multiple facets of the advent of a world that promised much freedom and progress but also uncertainty and lack of freedom. How do indigenous peoples experience modernity and what meaning do they give to their actions? This thesis is based on the ethnography of two Innu reserves in Quebec, more than thirty semi-structured interviews with actors of both communities, and an analysis of American Indian politics, legal documents and newspaper articles. This thesis focuses on the individuals without neglecting the forms of power that influence them, and explores the tension that indigenous societies experience in the creation of modern societies. While for over thirty years, the Innu fought for freedom and resisted the Canadian state, their actions also contributed to their confinement in a collective identity of victimization. This paradox inherent to the the indigenous movement took not the downfall of the Canadian nation-state, but rather one of the actors in its resurgence. Finally, aside from some political action that has been deemed destructive, certain individuals have taken it upon themselves to create a society that is no longer determined by the rules of the existing social system, but is a product of the identity of those at «the bottom». In conclusion, this thesis explores, through the double analysis of the subjectification by freedom, and of the political action for freedom, the tension that characterizes indigenous modernity.

Abstract FR:

L’idée de modernité repose intrinsèquement sur une rupture marquant une frontière entre la société moderne et le passé. L’autochtonie constitue à ce titre un véritable cas d’école pour les sociologues qui ont pu observer in situ les faces d’ombre ou de lumière associées à l’avènement d’un monde porteur autant de liberté et de progrès que d’incertitudes et d’assujettissement. Quelle expérience les peuples autochtones font-ils de la modernité et quel sens donnent-ils à leurs actions? Cette thèse se base essentiellement sur une ethnographie de deux réserves innues au Québec, une trentaine d’entretiens semi-directifs avec des acteurs de ces deux localités ainsi qu’une analyse des politiques indiennes, de documents juridiques et d’articles de presse. Ce travail, centré sur l’individu sans négliger les formes de pouvoir qui se déploient autour de celui-ci, révèle la tension qui traverse la production des sociétés modernes autochtones. En effet, si depuis plus de trente ans, les Autochtones luttent pour la liberté et résistent à l’État canadien, leurs actions contribuent en retour à leur propre enfermement dans une identité collective victimaire. Ce paradoxe, inhérent au mouvement autochtone, participe non pas au déclin de l’État-nation canadien, mais en fait l’un des acteurs de sa résurgence. Enfin, à l’écart de l’action politique jugée destructrice, des individus tentent d’agir en créant une forme de vie sociale non plus déterminée par les règles du système social, mais produite «par le bas» à partir de leur subjectivité. En somme, cette thèse explore, à travers une double analyse de la subjectivation par la liberté, et de l’action politique pour la liberté, la tension qui caractérise la modernité autochtone.