Le nouvel esprit du capitalisme agraire : les formes de l’autonomie ouvrière dans les plantations de palmier à huile en Indonésie
Institution:
Paris, EHESSDisciplines:
Directors:
Abstract EN:
Wage labor in agriculture is globally growing with the expansion of a capitalistic agriculture. Yet, this form of labor is not very much studied in Social Sciences. This research, built on the Sociology of Work, questions the social conditions that underlie agrarian capitalism. The approach focuses on the definition of workers’ autonomy, security and common good in large palm tree plantations in Indonesia. The thesis tests first the notion of “spirit of capitalism” as developed by Boltanski and Chiapello, applying it to workers – not to executives. It applies then this notion in a society where the Welfare regime is poorly developed. Field work, when contrasted against an historical ideal type of plantation capitalism, shows a change in the state of this capitalism since the 1970s. Conflict was the main mode that regulated labor during the first century of plantations development. The dismantling of a number of social protections and a new tolerance toward freedom of entrepreneurship brought social peace. Two forms of autonomy rose, which are mainly determined by the local conditions of access to land : controlled autonomy and acquired autonomy. A monographic approach of workers’ private lives witnesses however the remaining influence of hierarchical domination. The thesis concludes that partial autonomy, subtly associated with a strong and accepted control leads to the reinforcement of plantation capitalism. Results offer also food for thought on the wider issue of contemporary agrarian capitalism.
Abstract FR:
Le salariat agricole est un objet de recherche dont les sciences sociales s’emparent peu, alors que son importance croit au niveau mondial, avec l’expansion d’une agriculture hautement capitalistique. Cette thèse interroge les conditions sociales du développement du capitalisme agraire, en articulant une sociologie du travail fondée sur la caractérisation de l’autonomie, de la sécurité et du bien commun des ouvriers de plantations de palmier à huile en Indonésie. Elle propose une double mise à l’épreuve de la notion d’ « esprit du capitalisme » de Luc Boltanski et Ève Chiapello, en l’appliquant tout d’abord à des ouvriers -et non à des cadres-, et en la mobilisant dans une société à faible régime de protection généralisée. Elle développe également des pistes de réflexion visant à enrichir la connaissance du capitalisme agraire contemporain. L’enquête de terrain, confrontée à un idéaltype historique du capitalisme de plantation, met en évidence un changement d’état de ce capitalisme à partir des années 1970 : alors que le conflit fut le mode de régulation du travail pendant le premier siècle de son développement, le démantèlement de certaines protections sociales, associé à l’octroi d’une autonomie nouvelle sous forme de liberté d’entreprendre, entraîne la paix sociale. Deux formes d’autonomie, l’une contrôlée et l’autre conquise, se dessinent, déterminées par le contexte foncier régional. L’approche monographique de la vie privée des ouvriers indique toutefois une empreinte forte de la domination hiérarchique,démontrant alors comment de l’autonomie partielle des ouvriers, subtilement associée à un contrôle prononcé et accepté, découle un renforcement du capitalisme de plantation.