Humaniser la peine ? : ethnographie du traitement pénal en maison d'arrêt
Institution:
Paris, EHESSDisciplines:
Directors:
Abstract EN:
While French jails are facing the double-bind of an increasing number of prisoners to manage efficiently, and pressures to humanize their treatment, the development of judicial procedures and the role of legal professionals in the daily functioning of the prison changes practices of custody. Through an ethnography of two jails (observations and interviews with prisoners, staff, parole judges, lawyers, etc. ), the dissertation contributes to a sociology of institutions and of law in action. It investigates the often contradictory aspects of law in prison: a tool of mass management and of individualization of sentences ; an expression of the coercive power and a guarantee of the rights of the administration's subjects ; a neoliberal framing of reentry and a fundamental reference to human dignity. The outline follows the prisoner's trajectory and various moments of his evaluation (intake, disciplinary hearings, parole boards) : these practical uses of law are embedded into interactions between agents of the institution and their clients (men, mostly young, from lower socio-economic backgrounds and belonging to racial minorities). Multiple professional fields (custody, the judicial, the social) are involved, but also moral feelings pertaining to how notions like dangerousness, responsability or vulnerability are framed in the public sphere. Circulating between different scales (the local jail, the prison administration, public policies) this research offers, through the case study of prison, a contribution to an anthropology of the State.
Abstract FR:
Alors que les maisons d'arrêt françaises sont soumises à la double injonction de gérer efficacement un nombre croissant de personnes, et d'humaniser le traitement pénal, le développement des procédures juridiques et de la place des professionnels du droit dans le quotidien de la prison modifie les pratiques de prise en charge. À travers l'ethnographie de deux établissements (observations et entretiens avec détenus, personnels pénitentiaires, juges d'application des peines, avocats, etc. ), cette thèse contribue à une sociologie de l'institution et du droit en actes, étudiant les multiples facettes du droit en prison : instrument de gestion de masse comme d'individualisation de la peine, expression du pouvoir coercitif et garantie des droits des administrés, formulation d'une conception libérale de la réinsertion et du principe de dignité individuelle. Le développement suit le parcours carcéral du détenu et les différents moments de jugement (accueil des arrivants, commissions de discipline, audiences d'aménagement de peine) : ces mises en œuvre pratiques du droit sont encastrées dans des interactions entre les agents de l'institution et leur public (des hommes, souvent jeunes, issus de milieux populaires et des «minorités visibles») ; elles font intervenir des enjeux de champs professionnels multiples (sécuritaire, juridique, social) ainsi que des sentiments moraux relatifs aux formulations dans l'espace public des notions de dangerosité, responsabilité, vulnérabilité. Circulant entre l'échelle de l'établissement, de l'institution, et des politiques publiques, cette recherche propose, à partir du cas de la prison, une contribution à une anthropologie de l'État.