Contester sans organisations : stratégies de mobilisation, question sociale et espace de visibilité dans les grèves de l'industrie textile égyptienne 2004-2010
Institution:
Paris, EHESSDisciplines:
Directors:
Abstract EN:
Through the study of workers' protests that took place between 2004 and 2010, this thesis aims to study the mechanisms of social protest, highlighting modes of organisation and mobilisation strategies at work. While between 2004 and 2010 over two million Egyptians protested at their workplaces without the involvement of the official union structure, which does not represent the interests of its members, and outside political parties or groups, there is a tension between the lack of organisations belonging to the formal framework of the political field and the use of modes of protest that are intimately associated with these organisations. Based on an ethnographic study in two cities in the Nile Delta (Mahalla al-Kubra and Shibin al-Kawm), this study makes the following hypothesis: despite the authoritarian context and the apparent lack of party or union structures, collective action is neither spontaneous nor disorganised, although these two adjectives are often juxtaposed with workers' demonstrations in the absence of a thorough understanding of their context. They are shaped by professional relations, bonds of sociability, dynamics of gender and class -- with class dynamics reconfigured in terms of a broader social cleavage -- and the construction of a local scale of protest that allows for engagement, disengagement and hesitation on the part of political parties and activist groups in these mobilisations.
Abstract FR:
A travers l’étude de protestations ouvrières qui ont eu lieu entre 2004 et 2010, cette thèse analyse les logiques de contestation sociale en Egypte mettant en évidence les modes d’organisation et les stratégies de mobilisation à l’œuvre dans les grèves ouvrières. Alors qu'entre 2004 et 2010 plus de deux millions d’Egyptiens ont protesté sur leur lieu de travail sans la participation de la structure syndicale officielle, qui ne représente pas les intérêts de ses membres, et en marge des partis ou groupes politiques, il existe une tension entre l’absence d’organisations appartenant au cadre formel du champ politique et l’utilisation de modes de contestation qui sont intimement associés à ces organisations. Basée sur une étude ethnographique réalisée dans deux villes du Delta du Nil (Mahalla al-Kubra et Shibin al-Kawm), cette recherche formule l’hypothèse suivante : malgré le contexte autoritaire et l’absence apparente de structures partisanes ou syndicales, l’action collective n’est ni spontanée ni désorganisée, ces deux adjectifs étant pourtant souvent accolés aux manifestations ouvrières, faute d’une connaissance approfondie de leur contexte. Elles sont façonnées par des relations professionnelles, des liens de sociabilité, des dynamiques de genre, de classe – mais aussi par le dépassement de ces dernières en « question sociale » – et par la construction d’une échelle locale de la contestation qui n’exclut pas des logiques d’engagement, de désengagement et d’atermoiement des partis politiques et des groupes militants dans ces mobilisations.