thesis

S'engager au FN dans la "France des oubliés" : sociologie d'un parti politique hors des métropoles : le Front national en Mayenne et dans l'Yonne (années 1980 - années 2010)

Defense date:

Oct. 23, 2020

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Institution:

Paris 1

Disciplines:

Abstract EN:

The thesis analyses the Front national’s organisation and mobilisation away from urban centers. The Front National’s vote has been explained as the vote of outlying France ("la France périphérique"); Marine Le Pen claims that she is the voice of the French outcasts ("la France des oubliés"). What do the organisational development and the work of local activists of the radical right party remote from cities represent ?Who are the local leaders, the local candidates, and activists of the Front National (FN) inside remote areas? What does it involve? In order to explore these questions, both Mayenne and Yonne counties prove to be vantage points to observe FN mobilisations and partisan engagement inside French countryside and its little towns. Through this territorial entry, the thesis intends to restore individual commitments and collective mobilisations of the extreme right by re-embedding them into their contexts. This approach allows us to understand the structure of the FN over time and to rebuild the life of federations in a historicity specific to the territories studied. Based on archival material, the FN’s genealogy shows that this political group is embedded in several activist breeding grounds: the traditionalist Catholic mist, individuals close to the police force, a fraction of both traditional artisans and small independent workers on the decline, and supporters of French Algeria. Because of these historical connections, the far right-wing partisan milieu rarely succeeds in spreading beyond these founding cores. Through interviews and observations, the field re-search highlights the gap which divides the activist networks of the extreme right-wing and the FN electorate among which the working classes. Though some members of the low middle classes have high expectations in the "Marine" wave and join the party presided over by Marine Le Pen since 2011, the elitist, hyper-centralised and self-perpetuating processing of the party creates disappointments among them. In spite of a voluntarist strategy of "local establishment" in the 2010's, the Front National party rarely has access to local mandates and institutional resources that would make the organisation consolidate and stabilise its activists base. Among France outcast ("France des oubliés") which Marine Le Pen exhorts in her speeches, the FN remains a minority and an isolated political organisation, an auxiliary electoral force, and a marginal social movement. The majority vote system and the influence of the established parties do not allow the far right-wing party neither to become a party of elected officials and nor to achieve «notability». The Front National remains a party of activists, characterised by high turnover, and difficulties both in recruiting candidates and in professionalising its representatives

Abstract FR:

La thèse examine la manière dont le Front national s'organise et se mobilise à l'écart des grands centres urbains. Depuis plusieurs années, le vote FN est souvent présenté dans les médias comme celui de la «France périphérique» et Marine Le Pen se proclame porte-parole de la «France des oubliés». Mais que représentent l'implantation militante et le développement organisationnel du parti frontiste hors des métropoles ? Qui sont ses cadres territoriaux, ses candidats et ses militants dans les zones excentrées ? Que font-ils quand ils vont «au Front» ? Pour répondre à ces questions, la Mayenne et l'Yonne constituent des observatoires privilégiés des mobilisations frontistes et de l'engagement partisan dans des petites villes et les campagnes françaises. Par cette entrée territoriale, la thèse entend restituer les engagements individuels et les mobilisations collectives d'extrême droite en les ré-encastrant dans leur contexte. Cette démarche permet de saisir la structuration du frontisme dans le temps long et de restituer la vie des fédérations dans une historicité propre aux territoires étudiés. À partir de sources archivistiques, la généalogie du parti d'extrême droite montre que cette formation politique, dès l'origine, est enkystée dans quelques viviers militants: la nébuleuse catholique traditionaliste, des individus ayant des attaches avec les forces de l'ordre, une fraction des mondes de l'artisanat traditionnel et des petits indépendants sur le déclin, des partisans de l'Algérie française. Du fait de ces filiations historiques, le milieu partisan frontiste parvient rarement à essaimer au-delà de ces noyaux fondateurs. L'enquête de terrain, par entretiens et observations, met alors en évidence la distance qui sépare les réseaux militants d'extrême droite et l'électorat du parti appartenant notamment aux classes populaires. Si certains membres des petites classes moyennes fondent beaucoup d'espoirs dans la vague «bleue Marine» et rejoignent le parti présidé par Marine Le Pen à partir de 2011, le fonctionnement élitiste, hyper-centralisé et par cooptation du parti engendrent chez eux des déceptions militantes. En dépit d'une stratégie volontariste d'«implantation locale» dans les années 2010, le FN n'accède que rarement aux mandats locaux et aux ressources institutionnelles qui permettraient à l'organisation de se consolider et de stabiliser sa base militante. Dans la «France des oubliés» que Marine Le Pen exhorte dans ses discours, le FN reste une organisation politique minoritaire et isolée, une force électorale d'appoint et un mouvement social marginal. Le mode de scrutin majoritaire et l'emprise des partis installés ne lui permettent pas de devenir un parti d'élus et d'accéder à la «notabilité». Au total, le FN demeure un parti de militants, marqué par un fort turn-over, des difficultés à recruter des candidats et à professionnaliser ses représentants