thesis

Le projet existentiel de Norodom Sihanouk pour la nation khmère : le Cambodge du Sangkum

Defense date:

Jan. 1, 2003

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Institution:

Paris 1

Disciplines:

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Abstract FR:

En novembre 1953, le royaume du Cambodge retrouve une indépendance politique que la France lui avait confisquée pendant près d'un siècle. Pour Norodom Sihanouk, couronné roi en 1941 et principal artisan de cette reconquête (au terme de huit années de "croisade"), cette indépendance constituait moins un aboutissement heureux que le début d'une renaissance. Renaissance d'une fierté nationale que l'on croyait éteinte après six siècles de décadence. Renaissance d'un Etat qui n'avait cessé de perdre de sa substance en terme géographique, et qui, sur le plan juridique, n'existait quasiment plus un siècle plus tôt, avant que les troupes napoléoniennes ne fassent obstacle à son complet démantèlement. En novembre 1953, tout était pourtant à reconstruire: une économie ravagée, un territoire enclavé, des frontières contestées, des structures sociales disloquées, un pouvoir politique quasi inexistant. Mais le tableau ne serait pas complet si l'on omettait de mentionner les lourdes menaces que faisaient peser sur le jeune Etat les appétits expansionnistes des puissants voisins thai͏̈s et vietnamiens et les non moins pesantes pressions des " géants impérialistes " dans la péninsule indochinoise. Cette étude s'appuie sur les discours quasi quotidiens du prince Norodom Sihanouk depuis son abdication en 1955 jusqu'à sa destitution en 1970. Elle a pour cadre historique et politique la création, la même année, du Sangkum Reast Niyum (la communauté socialiste populaire), que Sihanouk avait conçu pour mettre un terme aux "querelles byzantines" auxquelles se livraient une classe politique immature, fonctionnant selon les mécanismes archai͏̈ques d'une société mandarinale. Ce mouvement populaire et révolutionnaire offrait en effet une opportunité unique de célébrer "l'authentique nation khmère" en réunissant tous les patriotes autour d'une idéologie nationaliste (le "socialisme bouddhique", e1le-même héritière des "glorieux bâtisseurs d'Angkor". Car le Sangkum, en ce qu'il facilitait le surgissement de l'Etat et en ce qu'il creusait jour après jour le si1lon d'une identité nationale décomplexée et forte, constituait aux yeux du prince la seule arme contre l'éradication complète de la race khmère, contre la perspective apocalyptique d'un Cambodge rayé de la carte du monde. Le projet existentiel de Norodom Sihanouk pour la nation khmère est donc à resituer dans un plan plus large qui est à la fois celui des petites nations historiques injustement écartées des grandes évolutions du monde et celui de la décolonisation. Le petit royaume partage avec les premières un désir de vivre qui leur a été longtemps contesté et avec les nouveaux Etats une quête identitaire que seul un leader politique fort (mi-despotique, mi-populiste) semblait pouvoir conduire. Mais le national-populisme de Sihanouk conservait une singularité propre en ce que la communauté socialiste et populaire qu'il a brutalement fait surgir a réussi à diffuser son emprise jusqu'au cœur du tissu social traditionnel dans une sorte de totalitarisme doux.