thesis

Le français colonial : politiques et pratiques de la langue nationale dans l’Empire (1880-1962)

Defense date:

Jan. 1, 2011

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Disciplines:

Abstract EN:

Publications dealing with « Francophonie » both emphasize the role of African independence leaders and underplay its colonial origins. We produce a more balanced history, highlighting the ambigous role assigned to language in the natives’ acculturation process based on two streams of sources. The rationale developed by the fathers of the French colonial idea, the founders of the Alliance Française and by Onésime Reclus, who coined the term “Francophonie” in 1880 is one major set. The other includes legislative documents and school curricula dealing with lingustic matters in the colonies. The ambiguity stems from a simultaneous desire to create resemblance (so as to assert imperial power and stimulate trade with the colonies) and to maintain, through differential mastery of the language, a distance between colonial agents and natives. French inculturation was thus designed to avoid, on the one hand, that too many natives be left out at the risk of becoming hostile to colonization and, on the other hand, to keep natives out of the community of French citizens. In the final analysis, the « francophone project » that emerged during the independence movements led by a minority of highly educated “french-speaking” natives remains ambiguous. French nationalism provides a successful account of the project’s civilizing mission, which allowed colonized populations to conceptualize their emancipation while simultaneously allowing to keep them within a French cultural sphere of influence. Conversly, it is also possible to analyze the project as a legacy of the “Negritude” movement and the uprooting of the language from its national origins.

Abstract FR:

A partir de l’argumentaire développé par les pères de l’idée coloniale française, par les fondateurs de l’Alliance française et par Onésime Reclus (inventeur du mot francophonie en 1880), mais également en nous appuyant sur les textes législatifs et les programmes scolaires encadrant les pratiques linguistiques dans les colonies, nous mettons en évidence le rôle équivoque dévolu à la langue dans le processus de colonisation. Il s’agit en effet tout à la fois de créer de la ressemblance (afin de manifester la puissance de l’empire français et de favoriser le commerce avec les colonisés) mais également de maintenir une distance entre la maîtrise de la langue des colonisateurs et celle des populations indigènes. En conséquence, la francisation doit être suffisamment sélective, d’une part pour éviter la formation de masses indigènes « déclassées » et rétives à la colonisation, d’autre part de continuer à pouvoir justifier leur non inclusion dans la communauté des citoyens français. Cette double tension se manifeste dans la scolarisation parcimonieuse des enfants indigènes en français pendant la période 1880-1945, mais également, a contrario, dans les progrès simultanés de la scolarisation en français et des droits à la citoyenneté obtenus par les colonisés après 1945. Ainsi le projet francophone, qui naît au moment des indépendances à l’initiative d’une minorité de colonisés extrêmement éduqués reste équivoque. Il peut être interprété par le nationalisme français comme le succès de la mission civilisatrice. Mais il peut également être compris comme un héritage du mouvement de la Négritude et l’arrachement de la langue française à la nation française.