Vers une ethnicisation de l'action publique ? : des emplois de médiateurs urbains pour une "nouvelle régulation sociale"
Institution:
Paris, Institut d'études politiquesDisciplines:
Directors:
Abstract EN:
Urban mediation jobs are hired by different kinds of institutions and officially aspire to reduce crime and enhance social cohesion. They often work with inhabitants of disadvantaged areas and people of foreign descent while many employees themselves are members of these groups. Urban mediation seemingly implements a communal social control, particularly entrusted to members of the very group it targets, and ethnic groups appear to become new criteria for French public policy. Basing our study on the cognitive analysis of public policy, we examine the social construction of identities in the context of fifteen urban mediation projects. This work introduces the main theories of ethnicity and defines a rigorous methodology to study ethnic groups in the context of a colour-blind Republic. The development of mediators’ jobs is also considered in the light of the history of urban policies implemented in low-income areas to confront three main issues: economic exclusion, the integration of immigrants, and the fight against urban violence. The sociological overview of mediators can be explained by the willingness of recruiters to ensure social proximity between mediators and their audience. Many organizations use these jobs as a cheap auxiliary labour force but other professionals worry their prerogatives are threatened. Then urban mediators inherited a heterogeneous breadth of activities that reveals a certain retreat of the administration from social regulation and the Nation State’s loss of influence in modern societies.
Abstract FR:
Les emplois de médiation urbaine sont recrutés par différents types d'institutions avec pour but officiel de lutter contre l'insécurité et de favoriser la cohésion sociale. Ces médiateurs interviennent souvent auprès des habitants des quartiers défavorisés et des populations d'origine immigrée alors que la plupart sont eux-mêmes issus de ces populations. Ces emplois apparaissent alors comme une forme de contrôle social particulariste, tenant compte des appartenances identitaires et des catégories ethniques. Grâce à l'analyse cognitive des politiques publiques, nous étudions donc les constructions identitaires dans une quinzaine de dispositifs de médiation urbaine. Nous présentons les grandes théories de l'ethnicité et élaborons une méthodologie adaptée à l'étude des constructions identitaires dans le cadre d'une République "une et indivisible". La création des emplois de médiateurs urbains est aussi envisagée à travers l'histoire de la politique de la ville et des actions entreprises face aux questions d'exclusion, d'intégration et d'insécurité. La sociographie des effectifs s'explique principalement par la volonté des employeurs d'assurer une certaine proximité sociale entre les médiateurs et leur public. Les employeurs utilisent les médiateurs comme des auxiliaires bon marché et plusieurs professionnels s'inquiètent de voir ainsi leurs prérogatives menacées. Les médiateurs héritent donc d'un champ d'activité particulièrement hétéroclite, qui traduit le retrait de l'administration dans la régulation des rapports sociaux et la perte d'influence de l'État-nation dans les sociétés contemporaines.