Habiter Sofia au tournant du XXIè siècle : essai géographique sur l'aménagement des espaces urbains post-socialistes
Institution:
Lyon, Ecole normale supérieureDisciplines:
Directors:
Abstract EN:
Pas de résumé disponible.
Abstract FR:
Cette thèse cherche à atteindre une meilleure compréhension des espaces urbains post-socialistes, à travers l'étude concrète des mutations de la propriété foncière et immobilière à Sofia, mais aussi à travers le sens que les Sofiotes accordent à ces espaces en mutation. Habiter est défini de façon large comme une manière d'être que nous étudions à travers les rapports des Sofiotes aux espaces habités, rapports qui se matérialisent à travers les formes et titres de propriété, mais aussi à travers la mobilité résidentielle et la dynamique des liens sociaux et en particulier l'habitus, et les pratiques et représentations des espaces sofiotes. Au-delà de l'analyse des mutations des structures sociales et spatiales sofiotes, une réflexion plus poussée porte sur les continuités et discontinuités entre les modes d'organisation et d'aménagement des espaces socialistes et post-socialistes au niveau de leur méta-structure commune, définie comme la modernité. La ville de Sofia se présente en tant qu'exemple géographique d'aménagement de lieux centraux et d'émergence de nouveaux modes de vie et de par son repositionnement dans le nouveau contexte politique, économique et social régional global. Sofia, dont le rôle a été, en Bulgarie, d'être la ville exemplaire de la "modernité socialiste", s'impose maintenant par excellence dans la quête d'un "modèle de la modernité occidentale". C'est aussi le lieu où l'habiter est le plus difficilement saisissable, surplombé par des logiques de production et de circulation fonctionnelles et gestionnaires. L'étude des rapports des Sofiotes aux espaces habités ne s'inscrit pas dans l'analyse des sociétés post-socialistes en termes d'appartenance à un espace social et culturel strictement défini. Elle examine l'interaction de mémoires vivantes antérieures aux changements post-socialistes et de l'expérience des Sofiotes de ces changements dans la perspective de l'interprétation des écarts, d'une part, entre villes post-socialistes, et d'autre part entre villes post-socialistes et villes occidentales au sein du système des villes européennes. L'objectif de cette thèse est de saisir, d'une part, la nature de la modernité sofiote dans sa quotidienneté en tant que médiation spatiale et géographique entre deux modèles de la modernité, et d'autre part, la nature de l'expérience de la spatialité post-socialiste. Dans le cas de Sofia, le raccordement des héritages socialistes encore actifs aux situations nouvelles est spécifique par rapport à la transition observée dans d'autres capitales post-socialistes du fait même que près de 90 % des Sofiotes sont propriétaires du logement qu'ils habitent en ville, et que près d'un ménage sur deux possède une résidence secondaire - et cela avant même le changement de régime, alors que pour les autres capitales l'accès à la propriété privée foncière et immobilière est devenu le principal indicateur du dépassement du socialisme réel. De la propriété individuelle élevée sous le régime socialiste découlent des rapports d'appropriation des espaces habités en ville dans lesquels l'habiter se résume à l'habitat-centre à partir duquel le résidant conçoit et pratique le monde. La propriété individuelle devient paradoxalement la garantie, pour l'Etat-Parti, du contrôle de la société. Après 1990, avec la transformation de cette propriété en privée et la séparation progressive des espaces et des pratiques entre public et privé, les rapports des Sofiotes à leurs espaces deviennent de plus en plus distendus du fait des nouveaux enjeux économiques et des politiques urbaines s'y mettant en place de manière mécanique. Les milieux sofiotes renouent à un certain degré avec leur passé pré-socialiste. Mais les politiques officielles actuelles, tout comme celles de la période socialiste, renient la plupart du temps ce réinvestissement facteur d'urbanité en le qualifiant de "retard"; très souvent elles s'inscrivent dans une continuité spatiale avec les structures socialistes. Les rapports des Sofiotes aux lieux, institué par le pouvoir socialiste à travers une politique volontariste d'aménagement des espaces, évolue vers un rapport encore plus abstrait du fait même de la trajectoire de ces espaces.