Mécanismes de localisation spatiale chez l'homme : interaction entre le système visuel et le système auditif
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Strasbourg 1Disciplines:
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Notre perception du monde résulte de traitements des signaux environnementaux, se présentant sous des formes d'énergie variées (e. G. , énergie électromagnétique pour la lumière; énergie mécanique pour le son). Ces traitements impliquent des mécanismes de transduction, de codage et de propagation du message, spécifiques à chaque système sensoriel, et aboutissent à des expériences perceptives qualitativement distinctes les unes des autres. Malgré la spécificité de chaque système sensoriel, la perception des événements est unifiée grâce à des liens étroits entre les différentes modalités sensorielles. Cette hypothèse est aujourd'hui communément admise grâce aux résultats de nombreux travaux au niveau neurophysiologique et comportemental. En effet, l'existence de convergence de signaux provenant de différentes modalités sensorielles, vers certaines structures cérébrales, ainsi que la mise en évidence de mécanismes d'interaction multimodale, tant au niveau neuronal que comportemental, semble montrer que ces signaux sont intégrés dans des processus communs de la perception. Au niveau perceptif, l'interaction multimodale se traduit par la modification de la perception d'un événement pour une modalité sensorielle donnée, lorsqu'une stimulation, d'une ou plusieurs autres modalités sensorielles, est émise simultanément. De nombreux travaux ont notamment mis en évidence des processus d'interaction entre le système visuel et le système auditif, grâce à l'étude de certaines illusions perceptives. Par exemple, dans un environnement bruyant, nous pouvons aisément suivre le discours d'une personne, si nous regardons les mouvements de ses lèvres (Cherry, 1953). D'autres observations montrent que la localisation d'un stimulus auditif peut être déplacée en direction d'un stimulus visuel présenté simultanément (Radeau and Bertelson, 1974). Par exemple, lorsque nous regardons un film au cinéma, nous avons l'impression que les voix des acteurs proviennent de l'écran, alors qu'elles sont en fait émises par des haut-parleurs situés de part et d'autre de l'écran. Si ces effets semblent mettre en évidence une influence du système visuel sur le traitement spatial des signaux auditifs, l'effet inverse n'est pas observé. Il semblerait ainsi que le flux des informations visuelles domine celui des informations auditives dans le traitement spatial d'événements audiovisuels et que la vision joue un rôle prépondérant dans notre perception de l'espace. Afin de préciser le rôle joué par le système visuel dans le développement des aptitudes spatiales auditives, certains chercheurs ont étudié les performances de personnes aveugles dans des tâches de localisation auditive. Les premiers résultats montraient que les performances de sujets aveugles de naissance, à localiser des cibles auditives, sont inférieures, d'une part, à celles de sujets aveugles ayant eu une expérience visuelle, et, d'autre part, à celles de sujets normaux, privés au cours de la tâche de toute stimulation visuelle (Fisher, 1964; Warren, Anooshian et al. , 1973). De ce constat, Fisher (1964) conclut que le développement d'aptitudes spatiales auditives nécessite une expérience visuelle. Le système visuel n'étant pas fonctionnel dès la naissance chez les aveugles congénitaux, leurs aptitudes spatiales auditives seraient considérablement altérées. Cependant, d'autres observations contredisent fortement cette hypothèse en mettant en évidence le développement de compensations spatiales auditives suite à une cécité congénitale. D'une part, les aveugles de naissance développent des capacités leur permettant de détecter, de localiser et d'identifier un objet dans leur environnement, par l'analyse des signaux acoustiques se réverbérant sur cet objet (Hausfeld, Power et al. , 1982; Kellogg, 1962; Rice, 1967, 1969; Rice, Feinstein et al. , 1965). D'autre part, les aveugles ont de meilleures performances de localisation de cibles auditives que les voyants, lorsque les stimuli auditifs sont émis à partir de régions spatiales périphériques, c'est-à-dire situées en dehors du champs visuel des voyants (Ashmead, Wall et al, 1998; Lessard, Pare et al. , 1998; Röder, Teder-Salejarvi et al. , 1999). Un déficit total du système a donc pour conséquence la mise en place d'une compensation auditive dans les processus spatiaux. Cependant, nous ne pouvons déterminer à partir de ces seules observations, le rôle joué par la vision dans le développement d'aptitudes spatiales auditives, lorsque le système visuel est fonctionnel. La question de l'influence de l'expérience visuelle sur l'élaboration d'une représentation de l'espace acoustique constitue le cadre général du présent travail.