Retours à Ouagadougou des étudiants burkinabè de Côte d'Ivoire : projet migratoire et stratégies d’inscription sociale
Institution:
Paris, EHESSDisciplines:
Directors:
Abstract EN:
In recent years the number of people who originated from Burkina Faso and who have been returning there after migrating to Ivory Coast or being born and raised there, has been increasing sharply; and this is particularly true of school children and students. The Burkinabe use the term “diaspo” to describe them. Present research concerns the situation of this group of youths from Burkina Faso returning from Côte d’Ivoire to go to the university in Burkina Faso. They are usually second and third generation descendants of migrants to Côte d’Ivoire. This work analyses their social and schooling course which is diverse, non-linear and multidirectional. These returning “diaspo” students illustrate numerous situations (family, economic, education) and migratory rationales. The study aims at underlining the reasoning that underlies the actions of these descendants of migrants and in particular pertaining to the migratory history of their parents, the primary migrants. Since returning implies several actors starting with family members, the decision to return to the native country appears as a long term process influenced by the will of parents, the advice of other persons, the influence of their peers etc., hence the need to analyse the “diaspo” student’s role.Contact with their country of origin places the “diaspo” on an unequal footing with those already there, i.e. the “first occupants”, in particular their peers born in the country and who stayed there. This coming together exposes the differences between Burkinabe from the “interior” and those coming or returning from outside. The descendants of the Burkinabe migrants are subject to the paradox of feeling like strangers both in the country in which they were born (Côte d’Ivoire) and their country of origin (Burkina Faso).Given this situation, these young people develop reasons (individual and/or collective) to stand out and assert themselves and by doing so manage to take control of the networks of their peer group and to make themselves visible in their university life (city, campus, restaurants) and in Ouaga’s social world. These networks are multiple, comprising student unions, political parties and other “organisations of Burkinabe civil society”, as well as student and religious associations. These forums to meet open up the possibility for solidarity and helping through symbolic and practical contributions towards their needs. Investment in the world of resourcefulness is not only a means of survival and self-sufficiency, it also initiates the “diaspo” to the Burkinabe social relationships through a dynamic process that starts from the bottom. These doings express the need for acknowledgement of one’s self and of one’s migration experience. The migratory project which, not-with-standing the studies, presents many profiles, is subject to constant adjustments all along the course of events and is dependent on the contexts.
Abstract FR:
Ces dernières années, la vague de retours au pays d’origine des descendants de migrants burkinabè nés et/ou ayant passé une grande partie de leur enfance en Côte d’Ivoire s’est intensifiée, notamment en ce qui concerne les jeunes scolaires et les étudiants. Dans le contexte burkinabè, le vocable « diaspo » est utilisé pour les désigner. Cette recherche porte sur la situation de ce groupe de jeunes burkinabè venus de Côte d’Ivoire, pour poursuivre leurs études supérieures au Burkina Faso. Ils appartiennent le plus souvent à la deuxième et à la troisième génération de migrants burkinabè en Côte d’Ivoire. Ce travail analyse leurs trajectoires sociales et scolaires, en essayant de montrer comment leurs itinéraires sont divers, non linéaires et multidirectionnels. L’histoire de chaque retour met en scène, à travers l’étudiant « diaspo », une multiplicité de sphères (familiale, économique, universitaire) et de logiques migratoires. L’étude vise à faire ressortir ces logiques qui structurent les parcours des descendants de migrants, en regard de l’histoire migratoire de leurs parents, primo-migrants. Dans la mesure où l’acte de retour implique plusieurs acteurs et, en premier lieu, la famille, la décision du retour au pays d’origine apparaît comme un processus à long terme, qui peut se faire sous l’injonction des parents, sur les conseils d’une personne extérieure à la famille, par l’influence des pairs, etc. C’est dans ce contexte que le rôle de l’étudiant « diaspo » devra être analysé.Le contact avec le pays d’origine situe les « diaspo » dans un rapport inégalitaire avec ceux qu’ils viennent trouver « sur place », c’est-à-dire « les premiers occupants », en particulier leurs pairs nés et restés au pays. Cette rencontre fait apparaître des distinctions entre les Burkinabè de « l’intérieur » et ceux (re)venus de « l’extérieur ». Les descendants de migrants burkinabè subissent le paradoxe d’une société burkinabè qui développe en eux le sentiment d’être étrangers à la fois dans leur pays de naissance (Côte d’Ivoire) et dans leur pays d’origine (Burkina Faso).Face à cette situation, ces jeunes développent des logiques de distinctions (individuelles et/ou collectives) et d’affirmation de soi, par lesquelles ils parviennent à prendre le contrôle de leurs réseaux d’appartenance et à se rendre visibles dans les espaces universitaires (cité, campus, restaurants) et dans le monde social ouagalais. Ce sont des réseaux multiformes, allant des syndicats étudiants aux partis politiques et autres organisations de la « société civile burkinabè », en passant par les associations étudiantes et religieuses. Ces espaces de rencontre sont des lieux d’entraide et de solidarité et ouvrent à diverses formes de rétributions symboliques et matérielles attendues. L’investissement dans l’univers de la débrouille, en plus d’être un moyen de survie et d’autonomisation, introduit les « diaspo » dans l’apprentissage des rapports sociaux au Burkina, dans une dynamique d’insertion sociale par le bas. Ces pratiques expriment un besoin de reconnaissance de soi et de son expérience migratoire. Le projet migratoire, qui se décline alors en plusieurs facettes, en plus des études, est sans cesse soumis à des réajustements au long du parcours en fonction des contextes.