thesis

La fabrique des maîtres : anthropologie des pratiques de transmission de la musique hindoustanie ou les enjeux de l’institutionnalisation d’un savoir dans l’Inde contemporaine

Defense date:

Jan. 1, 2015

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Institution:

Paris, EHESS

Directors:

Abstract EN:

This socio-anthropological study focuses on the transmission of Hindustani music, starting at the end of the 19th century and continuing up until today. Its main purpose consists in analyzing the different contexts in which this concert music, often referred to as North Indian “classical music,” is produced. Either considered as a hereditary occupation for specialized low castes (mostly Muslims), or a leisure activity for an urban Hindu elite—quick to present it as the heir of a traditional Brahmanic science—Hindustani music, which is also an academic subject, has been transformed by its environment and adapted by the men producing it. Each “location of knowledge” is linked to its own source of legitimacy and responds to a system of values which embodies distinctive ways of experiencing the music and reveals a contrasting approach to history. This dissertation aims to understand the discursive, social and technical practices at work in the transmission of Hindustani music. These characteristics are at the heart of socio-political and artistic issues which make the micro-sociological level (the act of transmission) mirror the macro level (the patronage system and its ideology). Ultimately, the definition of this musical tradition illustrates the circulation and re-appropriation of knowledge in contemporary India. My research relies on ethnographic fieldwork conducted primarily in Delhi over a nine-year period, and is complemented by a historical study of the institutionalization process of musical knowledge since 1870. Through a social and aesthetic evaluation of this evolution, the thesis intends to contribute to current research in the field of performing arts in South Asia, and to take part in the ongoing discussions on the history and anthropology of knowledge.

Abstract FR:

Cette thèse propose une anthropologie de la transmission de la musique hindoustanie, de la fin du 19e siècle jusqu’à nos jours. L’analyse des différents espaces de production de cette musique de concert, souvent dénommée « musique classique » de l’Inde du Nord, en constitue l’axe principal. Tour à tour occupation héréditaire de basses castes (essentiellement musulmanes), loisir de l’élite urbaine hindoue — prompte à la présenter comme l’héritière d’une science traditionnelle brahmanique —, et enfin discipline académique, la musique hindoustanie se meut en fonction des structures et des hommes qui la produisent. Chaque « lieu de savoir » s’inscrit dans un type de légitimité et un système de valeurs qui lui est propre, et illustre, à ce titre, différentes manières de vivre la musique autant que des rapports contrastés à l’histoire. L’étude vise à appréhender les caractéristiques discursives, sociales et techniques de la transmission de la musique hindoustanie. Celles-ci sont au cœur d’enjeux socio‑politiques et artistiques qui mettent en miroir le niveau microsociologique (l’acte de transmission) et le niveau macro (le système de patronage et son idéologie). La définition de cette tradition musicale illustre, in fine, les implications de la circulation et de la réappropriation d’un savoir dans l’Inde contemporaine. Cette recherche s’appuie sur une ethnographie, réalisée essentiellement à Delhi au cours d’une enquête de terrain étendue sur neuf années, et sur une étude historique des processus d’institutionnalisation à l’œuvre depuis 1870. En évaluant les conséquences sociales et esthétiques de l’institutionnalisation du savoir musical, ce travail d’anthropologie historique souhaite contribuer aux nouvelles recherches sur les arts de la performance en Asie du Sud, et participer aux réflexions menées dans le domaine de l’histoire et de l’anthropologie des savoirs.