Troubler le genre du "séga typique" : imaginaire et performativité poétique de la créolité mauricienne
Institution:
Paris, EHESSDisciplines:
Directors:
Abstract EN:
The premise of this dissertation is to critically examine the legitimation of poetic, musical, or choregraphic genres whose institutional recognition favors identification in a nation or in a community. The "typical" Mauritian Sega provides an example of the production of a "Creole national tradition" within a multicultural postcolonial context. This dissertation interrogates the definitional evidence of the "typical Sega", understoodas the almost intact heritage of the singing, dancing, and musical practices of Black Slaves, passed on throughoral tradition. Initially, I provide a critical analysis of a genealogical kind: from the emergence of colonial francophone discourses about the "danse des Nègres" and the "chant des noirs" in the 18th century, to the first apparition of the "typical Sega" during the "night of Sega" on october 24th, 1964. Subsequently, I show that the stabilization of this genre is related to a process of racialization, intrinsically tied to the elaboration of a colonial imaginary of creoleness. The anlysis of Mauritian creoleness by the historical ethnography of the "typical Sega" is compared with the study of performances from the years 1925 and 1970, and with the poetics elaborated by Sega performers Ti Frer, Fanfan, and Josiane Cassambo from repertoires of "typical Sega" that were constituted a posteriori. The hypothesis of poetic performativity of creoleness, which stems from a transdisciplinary approach to "typical Sega", allows us to the undermine the essentialist categories inherited by imperialism and colonialism, and to introduce a relationship with Indianness, and thus to break with a fixed notion of Mauritian Creoleness.
Abstract FR:
La thèse présentée est née d’un questionnement relatif à la légitimation de genres poétiques, musicaux ou chorégraphiques dont la reconnaissance institutionnelle favorise une identification nationale ou communautaire. Le « séga typique » mauricien offre un exemple de la production d'une « tradition créole nationale » dans un contexte postcolonial multiculturel. L'objet de cette thèse est d'interroger l'évidence définitionnelle du « séga typique », entendu comme étant l’héritage presque intact des pratiques de chant, de musique et de danse des esclaves noirs transmises par le biais de la tradition orale. Débutant par une analyse critique de type généalogique - de l'émergence des discours coloniaux du XVIIIe siècle relatifs à la « danse des Nègres » et au « chant des Noirs » jusqu'à la première manifestation de « séga typique » lors de « La Nuit du séga » du 24 octobre 1964 - je montre que la stabilisation de ce genre se rapporte à un processus de racialisation intrinsèquement lié à l’élaboration d’un imaginaire colonial de la créolité. L'analyse de la créolité mauricienne par l'ethnographie historique du « séga typique » est ensuite confrontée à l'étude des performances datant de 1925 et 1970 et de la poétique façonnée par les ségatier-e-s Ti Frer, Fanfan et Josiane Cassambo depuis des répertoires du « séga typique » constitués a posteriori. L’hypothèse de la performativité poétique de la créolité, émise dans une approche transdisciplinaire du « séga typique », permet de faire exploser les catégories essentialistes héritées de l'impérialisme et du colonialisme, d'introduire le rapport à l'indianité et ainsi de rompre avec une vision fixiste de la créolité mauricienne.