thesis

L'enseignement des musiques traditionnelles en Colombie : identités régionales, patrimonialisation et rapports de pouvoir

Defense date:

July 4, 2019

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Institution:

Sorbonne Paris Cité

Disciplines:

Abstract EN:

In 2013, Bogota City Council created art centers offering free Andean music education for young people. Two years later, the city of Santa Marta finances similar music schools where Vallenato is taught. These musics acts as structuring elements of regional and national identities. Indeed, Andean music is at the heart of debates since the nineteenth century about the definition of national musical identity. After years of intense diffusion, it suffered a slow decline from the 1960s on. Today, its celebration is intimately linked to the heritage process of which it is the object. In addition, Vallenato was chosen by a local elite in the 1960s to embody the regional identity of the newly created Cesar Department. This music currently enjoys international success, but the so called classic vallenato is inscribed in 2015 on the list of intangible heritage in need of urgent safeguarding by UNESCO. These musics are at the heart of discourses with strong emotional and symbolic charge: their transmission embodies the defense of the propio, of "what is ours". Moreover, in the music schools of Bogotá and Santa Marta, the transmission modalities of these musics stand out from the academic precepts. The didactic structuring leads to think this academic heritage, as well as the conditions of the choice of a standardized repertoire and the final production, the concerts. Supported by municipal authorities, political issues sometimes take precedence over pedagogical issues. These schools invite us to think more broadly about public policies, political life and the networks that implement them. The challenge of this thesis is to better understand the process of politicization of this teaching. The field work was conducted in music schools, with administrative staff, teachers and students. Faced with globalization and the music industries, some of whom are afraid that they are totalizing, the transmission of local music is experienced as a politicized stance. In parallel, the municipal public authorities make differentiated uses of these schools. Indeed, the latter give flesh to contemporary discourses around peace that agitate the national society in its management of the "post-conflict", but also around equality and respect for musical diversity in a country that appears as multicultural. However, these schools are also at the heart of customer practices and represent a powerful tool for electoral issues. It is ultimately at the heart of the politicization of the teaching of "traditional music" of Colombia that we plunge this thesis.

Abstract FR:

En 2013, la mairie de Bogota crée des centres d'art proposant un enseignement gratuit de musique andine pour les jeunes. Deux ans plus tard, la ville de Santa Marta finance des écoles de musique similaires où est enseigné le vallenato. Ces musiques se présentent comme des éléments structurants des identités régionales et nationale. En effet, à partir du XIXème siècle, la musique andine est au cœur des débats portant sur la définition de l'identité musicale nationale. Après des années d'intense diffusion, elle subit à partir des années 1960 un lent déclin. Aujourd'hui, sa festivalisation est intimement liée aux processus de patrimonialisation dont elle fait l'objet. Par ailleurs, le vallenato est choisi par une élite locale dans les années 1960 pour incarner l'identité régionale du département du Cesar, récemment créé. Cette musique jouit actuellement d'un succès international, mais le vallenato dit classique est inscrit en 2015 sur la liste du patrimoine immatériel nécessitant une sauvegarde urgente de l'UNESCO. Ces musiques sont au cœur de discours à forte charge affective et symbolique : leur transmission incarne la défense de lo propio, de « ce qui est à nous ». En outre, dans les écoles de musique de Bogota et de Santa Marta, les modalités de transmission de ces musiques se détachent des préceptes académiques. La structuration didactique amène à penser cet héritage académique, ainsi que les conditions du choix d'un répertoire standardisé et la production finale, les concerts. Portés par les pouvoirs municipaux, les enjeux politiques prennent parfois le pas sur les enjeux pédagogiques. Aussi ces écoles invitent-elles à penser d'une manière plus large les politiques publiques, la vie politique et les réseaux qui les mettent en œuvre. L'enjeu de cette thèse est de mieux comprendre les processus de politisation de cet enseignement. Le travail de terrain a été mené dans des écoles de musique, auprès de personnels administratifs, de professeurs et d'élèves de ces dernières. Face à la globalisation et aux industries musicales, dont certains de ces interlocuteurs craignent qu'elles ne soient totalisantes, la transmission des musiques locales est vécue comme une prise de position politisée. En parallèle, les pouvoirs publics municipaux font des usages différenciés de ces écoles. En effet, ces dernières donnent chair aux discours contemporains autour de la paix qui agitent la société nationale dans sa gestion du « post-conflit », mais aussi autour de l'égalité et du respect de la diversité musicale dans un pays qui s'affiche comme multiculturel. Pour autant, ces écoles sont aussi associées à des pratiques clientélaires et représentent un puissant outil au service d'enjeux électoraux. C'est finalement au cœur de la politisation de l'enseignement des « musiques traditionnelles » de Colombie que nous plonge cette thèse.