Abstract FR:

Marche et nation forment, a priori, deux liens sociaux fondamentalement opposes : tandis que le premier developpe indeniablement une tendance a l'universalisation, parce qu'il repose sur une conception individualiste des relations sociales, la seconde institue des groupes qui fractionnent l'humanite. Il convient donc de voir sur quel mode les premiers economistes ont pu concevoir le lien qui s'etablissait entre le developpement de la nation et celui de l'activite economique. Le mercantilisme de montchretien a redefini les hierarchies sociales a partir de l'activite economique le traite d'economie politique permet de voir comment l'unite nationale a pu etre pensee a partir d'une ebauche de circuit economique dans lequel chaque element est utile. Ainsi, l'economie refonde le lien social national et permet d'affirmer la necessite d'enrichir chaque membre de la nation. Chez francois quesnay, la nation se definie egalement a partir de l'activite economique : n'en sont membres a part entiere que ceux qui permettent une production et une reconstitution du produit net. Le marche et le libre-echange unifient la nation et bouleversent les hierarchies de l'ancien regime, en assurant la promotion des proprietaires-capitalistes. Pour adam smith, la nation preexiste au marche, et conditionne la stabilite de l'activite economique. Elle permet le developpement d'une morale qui contraint chaque individu a respecter les interets des autres. Le marche porte neanmoins en lui les ferments d'une dissension des interets individuels, en favorisant la corruption des sentiments moraux, en particulier chez les capitalistes. Les antagonismes de classes, qui se manifestent dans le partage de la valeur, remettent alors en question l'equilibre du corps social. Autrement dit, l'extension du marche si elle se solde par une dislocation de la nation et des institutions politiques qui en assurent le bon fonctionnement, ne peut qu'entrainer des conflits destructeurs.