thesis

Pour une anthropologie du rire : les cadres de l'expérience du corps riant dans les villages de la Kagera (Nord-Ouest de la Tanzanie)

Defense date:

Dec. 6, 2019

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Institution:

Aix-Marseille

Disciplines:

Abstract EN:

Laughter is a universal behavior, all humans laugh. Our purpose is not to dispute this but to argue that laughter cannot be solely reduced to this universal definition. This study aims at going beyond the debate about innate and acquired behaviors by showing that although laughter may be universal, it results also from a social learning process.This research is based on an ethnographic survey undertaken in villages from the Kagera region in Tanzania. Laughter has already raised a social challenge there in the past. In 1962, a “fit of giggling”, locally known as "the disease of laughter", spread in a girl’s boarding school. This event proves the existence of an affective script. In these villages, laughter is an acquired social practice, to some extent laughter there is a right which must be acquired. Individuals must laugh according to their age, status and gender, and according to context. Some laughs are inappropriate and must be inhibited, if they are not, they are seen as disrespectful, obscene, even dangerous, as were the girl’s laughs in 1962. Other laughers reflect ethic and aesthetic social obligations. However, and despite the institution of these "laughing frames", people perpetually reinvent new ways of laughing. They appear in social back-stages, in liminal or in-between spaces. In these villages, there are also outsiders whose laughter compromise socials norms. Thus, if laugher can reinforce social order it also can also question it. This thesis tries to demonstrate that the body, the socio-cultural factors and the inter-individual relations are in permanent interaction, that is why laughter must be understood as a fluctuating and shifting phenomenon.

Abstract FR:

Le rire fait incontestablement partie des universaux humains : on ne connait pas de société qui ne rit, ni même d’individu incapable de rire. Je ne conteste pas cette idée, mais invite à penser que le rire ne peut se limiter à cette définition universaliste. Cette thèse entend dépasser le débat de l’inné et de l’acquis, en postulant que le rire est universel, mais résulte d’un apprentissage social qui « domestique » son expression. Cette recherche s’est effectuée à partir d’une enquête ethnographique dans les villages de la Kagera en Tanzanie, où le rire avait déjà fait parler de lui. En 1962, une « crise de fou rire » que les habitants ont appelé « la maladie du rire » (omumneepo) s’est répandue dans un internat de jeunes filles dans le village de Kashasha. Ce « fait-divers » constitue le point de départ de cette thèse, qui porte essentiellement sur les pratiques du rire dans ces villages tanzaniens. Pour les habitants de la Kagera le rire est un droit qui s’acquiert et que tout le monde ne possède pas. Certains rires sont inappropriés et il faut savoir les retenir sans quoi ils peuvent devenir irrespectueux et même dangereux, comme l’ont été les rires de ces jeunes filles en 1962. D’autres répondent à une éthique tout autant qu’à une esthétique sociale et relèvent de l’obligation la plus parfaite. Toutefois, et malgré l’institution de ces « cadres-rire », les rieurs riant réinventent constamment de nouvelles manières de rire. Il existe aussi des rieurs marginaux dont le rire transgressif bouleverse les normes et les structures et les remet même en question. Ainsi, si le rire peut être garant de l’ordre social, il a aussi le pouvoir de le renverser.