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Le moi, idole d'une volonté désarmée : Pascal, critique de la liberté cartésienne

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May 24, 2019

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Abstract EN:

Quite often, Pascal is presented as the main critic of Cartesian optimism about human reason. Indeed, Pascal's oeuvre is full of examples that underline the weakness of the capacity that "would like to judge everything" (Laf. 110). In a fragment of his Entretien avec Monsieur de Sacy, Pascal was delighted to find in Montaigne a brother in arms for having dethroned reason: "I cannot see without joy in this author the superb reason so invincibly offended by his own weapons" (Pascal, Entretien avec Monsieur de Sacy, éd. Laf., p. 295)But what if we apply this expression not to reason, but to the human will? Pascal does not only criticize the force of reason, he also attacks, first and foremost, the idea of a free will that is naturally inclined towards truth and goodness and that constitutes the source of a just relationship with oneself.For Pascal, the will is not an inalienable force, a power of self-determination and self-mastery. Posing that "we only possess lies" (Laf. 131), that "we only have an impotent instinct for happiness" (Laf. 131) and that "we want to live an imaginary live in the eyes of the others" (Laf. 806), Pascal denies that our relationship to truth, the good, and ourselves depends on the use of free will.How can the self (le moi) be interpreted in relation to the will? In the Pascalian universe, freedom as a condition for self-discovery has become illusory: the self betrays the presence of an unarmed will, that is, a will that no longer has firm judgments to oppose violent passions. In this sense, Pascal’s notion of the self goes beyond a simple criticism of the Cartesian ego cogito. If Pascal questions himself about the self, his aim is not only to decentralize or de-substantialize the ego from the Meditatio Secunda. Instead of focusing on a comparative study between the Cartesian ego and the Pascalian moi, I have interpreted the notion of the self in Pascal as a triple critique of the Cartesian free will: the self expresses our incapacity (1) to reach the truth (being related to the lie), (2) to achieve happiness (the self being closely linked to le divertissement) and (3) to relate to ourselves authentically

Abstract FR:

Bien souvent, Pascal est pensé comme celui qui s'oppose à l'optimisme cartésien touchant la raison humaine. Et en effet, l’œuvre de Pascal fourmille d’exemples qui soulignent l’impuissance de cette capacité qui « voudrait juger de tout » (Laf. 110). Dans un fragment de son Entretien avec Monsieur de Sacy, Pascal se réjouissait alors de trouver dans Montaigne un compagnon d’armes pour avoir détrôné la raison : « je ne puis voir sans joie dans cet auteur la superbe raison si invinciblement froissée par ses propres armes » (Entretien, éd. Laf., p. 295). Mais si on applique cette expression non pas à la raison, mais à la volonté humaine ? Pascal ne se limite pas à critiquer uniquement la force de la raison : il attaque d’abord et avant tout l’idée d’un libre arbitre qui est naturellement incliné vers le vrai et le bien et qui constitue la source d’un juste rapport avec soi-même. La volonté ne constitue pas pour Pascal une force inaliénable, une puissance de se déterminer par soi et de se rendre maître de ses actions. Posant que « nous ne possédons que le mensonge » (Laf. 131) , que « nous n’avons qu’un instinct impuissant du bonheur » (Laf. 131) et que « nous voulons vivre dans l’idée des autres d’une vie imaginaire » (Laf. 806) , Pascal dénie que notre rapport au vrai, au bien et à nous-mêmes dépend de l'usage du libre arbitre.Reste à savoir quelle est l'interprétation de cette notion du 'moi' en rapport avec la volonté? Dans l’univers pascalien, l'idée d'un libre arbitre comme condition d’une découverte de soi est devenue illusoire : le moi trahit la présence d’une volonté désarmée, c’est-à-dire une volonté qui ne dispose plus des jugements fermes pour s’opposer aux passions violentes. En ce sens, la notion du moi dépasse une simple critique de l’ego cogito cartésien. Si Pascal se pose la question « qu’est-ce que le moi », il n’a pas seulement pour but de décentrer ou de désubstantialiser l’ego de la Meditatio Secunda . Au lieu de nous pencher sur une étude comparative entre l’ego cartésien et ce moi introuvable du fragment Laf. 688 (« Qu’est-ce que le moi ? »), nous avons conçu la notion du moi comme une triple critique du libre arbitre cartésien : le moi est étroitement lié au mensonge (le domaine du vrai), il est lié à la recherche inquiète du bonheur dans le divertissement (le domaine de la morale), et il exprime la tromperie de soi.