Abstract FR:

Cette étude peut être conçue comme une histoire des codages sociaux du suicide, et plus précisément de trois rituels qui ont été imposés successivement à l'acte de se tuer : le rituel pénal, étudié dans son point d'évanescence, le XVIIIe siècle, le rituel aliéniste du début du XIXe, le rituel de la connaissance enfin et surtout, dont le "suicide" de Durkheim est le témoin décisif et la figure la plus achevée. Mais cet écrit a une toute autre visée que la production d'une histoire de la répression (judiciaire, aliéniste et cognitive) de la mort volontaire. Son ambition n'est pas d'énoncer la vérité des gestions pratiques du corps et de l'âme des suicides, mais d'élaborer une histoire du concept de suicide. De ce fait, cette thèse s'efforce d'apporter une pierre pour l'édification d'une archéologie des sciences humaines, par la lecture attentive du discours "pré-sociologique" sur le suicide, discours qui témoigne d'une peur générale à l'égard de ce qui aura été le premier fléau social. Que la sociologie soit née de cette peur et soit un effet des transformations sémiologiques générées par cette peur, telle est la conclusion fondamentale de cet écrit.