Justice sociale et santé : l’accès aux soins à Abidjan
Institution:
Clermont-Ferrand 1Disciplines:
Directors:
Abstract EN:
Social justice is one of the fundamental questions in contemporary economics. From the seventies, it has been the subject of a renewal of interest among philosophers and economists. Economic theories of justice aim at proposing conditions leading to a just society. They have also inspired justice principles to be applied to specific society fields. Health, in particular, appears as a privileged application field of these theories. The question of justice in health field arises with a particular intensity in development countries where health conditions are low and where resources allocated to health are often insufficient and badly used. The approach developed here is at the intersection of the three main fields of economics above-mentioned namely social justice analysis, health economics and development economics. The thesis aims at analyzing, in terms of justice, the impact of the health policy currently performed in the majority of West African countries, and in particular in Ivory Coast. This policy is based on the principles of Bamako Initiative, initiated by WHO, UNICEF and West African countries governments. It is based notably on two points: user fees and health care quality improvement. These principles raise an animated debate about the justice of such a policy. Some claim that justice is guaranteed because this health care reform should allow health care access for the majority of people. Others, in return, consider this policy unfair insofar as it may exclude the poorest sick out of health care system. This thesis intends to participate in this discussion and to bring elements of response to the question of justice raised here. It comprises four movements. The first one presents the principal economic theories of justice developed during this century. It allows to grasp with precision the notion of justice, fundamental in this research. The second one analyses justice principles developed in the more specific field of health. It leads to identify an empirical method that enables to detect a possible unfair impact of the health policy currently performed in Abidjan. This method, lying on an econometric estimation of a health care demand function, uses data of a survey that we personally conducted in Abidjan, from February to march 1998, among more than 4000 households. The third movement presents the main characteristics of this field work and analyses, from a justice point of view, the descriptive results obtained from this survey. Quite an injustice, felt at the end of this descriptive analysis, is confirmed by the econometric results exposed in the fourth time of this thesis. Indeed, user fees impact on health care demand appears inequitable because it is particularly unfavorable to the poor. Moreover, quality improvement, which is supposed to offset negative price effect, may essentially rise up health care use by the rich. Alternative solution, more favorable to the poorest, are then discussed. Several targeting policies, aimed at directing public resources in priority to the poor, are, in particular, analyzed. If some of them may be defended from a theoretical point of view, their implementation may force some difficulties. Then, such propositions must be improved and the research of other solutions that would even better assure health care access to the poor must, more than ever, be pursued.
Abstract FR:
La justice sociale est l’une des questions fondamentales de l’économie contemporaine. Elle a suscité, à partir des années soixante-dix, un regain d’intérêt parmi les philosophes et les économistes. Les théories économiques de la justice se sont alors attachées à proposer les conditions permettant d’aboutir à un état de société juste. Elles ont aussi largement inspiré les principes de justice appliqués à des domaines spécifiques de la société. La santé, en particulier, apparaît comme un champ d’application privilégié de ces théories. La question de la justice dans le domaine de la santé se pose avec une intensité particulière dans les pays en voie de développement où l’état sanitaire des populations est faible et où le montant des ressources allouées à la santé et souvent mal utilisé. La problématique développée ici s’inscrit à la croisée des trois grands domaines de l’économie évoquée ci-dessus, à savoir l’analyse de la justice sociale, l’économie de la santé et l’économie du développement. La thèse se propose d’analyser en termes de justice, l’impact de la politique sanitaire menée actuellement dans la majorité des pays d’Afrique de l’Ouest et, en particulier, en Côte d’Ivoire. Cette politique est basée sur les principes de l’Initiative de Bamako, lancée en 1987 par l’OMS, l’UNICEF et les gouvernements des pays d’Afrique de l’Ouest. Elle repose notamment sur deux points : le paiement d’une partie des soins par les usagers et l’amélioration de la qualité. Ces principes suscitent un débat fort animé relatif à la justice d’une telle politique. Pour certains, la justice est garantie car cette réforme sanitaire devrait permettre l’accès aux soins du plus grand nombre. D’autres, en revanche considèrent cette politique injuste dans la mesure où elle risque d’exclure du système de soins les malades les plus pauvres. Cette thèse entend prendre part à ce débat et apporter des éléments de réponse à la question de justice soulevée ici. Elle se déroule en quatre mouvements. Le premier dresse un tableau des principales théories économiques de la justice développées au cours de ce siècle. Il permet de cerner avec précision la notion de justice, fondamentale dans cette recherche. Le second analyse les principes de justice développés dans le domaine plus spécifique de la santé. Il conduit à identifier une méthode empirique nous permettant de détecter une éventuelle injustice de l’impact de la politique sanitaire en vigueur à Abidjan. Cette méthode, reposant sur l’estimation économétrique d’une fonction de demande de soins, utilise les données d’une enquête menée par nos propres soins, à Abidjan, de février à mars 1998, auprès de 4000 ménages. Le troisième mouvement présente les grands traits de ce travail de terrain et analyse, sous l’angle de la justice, les résultats descriptifs issus de cette enquête. Une certaine injustice dans l’accès aux soins est pressentie à l’issue de cette analyse descriptive et confirmée par les résultats économétriques exposés dans le quatrième temps de la thèse. L’impact de la demande du système de l’amélioration de la qualité des soins, supposée compenser l’effet négatif du prix, est susceptible d’accroître essentiellement le recours aux soins des plus riches. Des solutions alternatives, plus favorables aux démunis, sont alors discutées. Différentes politiques de ciblage, destinées à diriger les ressources publiques en priorité vers les plus pauvres, sont, en particulier, analysées. Si certaines peuvent être défendues d’un point de vue théorique, leur mise en œuvre risque de se confronter à des difficultés. Ces propositions doivent donc être affinées et la recherche d’autres solutions permettant d’assurer, de façon plus adaptée encore, l’accès aux soins des plus démunis, doit plus que jamais, être poursuivie.