Les peintres devant l'écriture : les représentations de l'écriture dans le discours de quelques peintres : de Delacroix à Dubuffet
Institution:
Paris 1Disciplines:
Directors:
Abstract EN:
What, for a painter, is writing ? An analysis of explicit remarks made by a small number of artists (Delacroix, Fromentin, Moreau, Matisse, Gauguin, Giacometti, Hélion and Dubuffet) is accompanied here by a description of the stylistic resources employed by each of them, resources which are revealing strategies of their representation of writing. It can be observed that these experiments in writing are, in every respect, dominated by the literary model and also that the strategies adopted to solve these difficult problems are the constituents of true poetics. The excuse for any supposed clumsiness belongs to the ritual of writing for the artist ; this same clumsiness when claimed by the painter becomes the basis of an original writing which developps freely in the form of notes, correspondence or a diary ; it thus escapes the constraints of perfection and achievement that are linked to the book and it gives a place to other free figures borrowed from the vocabulary of discontinuity, improvisation and the associations of ideas or games with the signifier. The writing of artists is, in the end, only an example of what amateur writing can be and what it can do. Ordinary in the sense that it is not part of the institutional stakes of art and literature, it is open to a literary reading which demands that the text be both the vehicle of a sense and a game with the linguistic material to the extent that, rather than obliterating them, it constantly shows the traces of its articulation.
Abstract FR:
Qu'est-ce qu'écrire pour un peintre ? L'analyse des propos explicites tenus par un petit nombre d'artistes (Delacroix, Fromentin, Moreau, Matisse, Gauguin, Giacometti, Hélion, Dubuffet) s'accompagne ici de la description des ressources stylistiques déployées par chacun d'eux, stratégies révélatrices de leurs représentations de l'écriture. On observe d'une part que ces essais d'écriture sont en tous points dominés par le modèle du littéraire, et d'autre part que les solutions adoptées pour résoudre des problèmes difficiles (en particulier celui de la référence) constituent les éléments d'une véritable poétique. L'excuse pour une maladresse supposée appartient au rituel de l'écriture de l'artiste ; cette même maladresse, revendiquée, devient la condition d'une écriture originale qui se développe en toute liberté sous forme de notes, de correspondance ou de journal intime ; en cela, elle échappe aux contraintes de perfection et d'achèvement liées au livre, elle permet d'autres figures, libres celles-ci, empruntées au vocabulaire de la discontinuité, de l'improvisation, de l'association d'idées ou des jeux avec le signifiant. L'écriture des artistes n'est finalement qu'un exemple de ce que peut être et de ce que peut faire une écriture amateur, ordinaire en ce sens qu'elle est étrangère aux enjeux institutionnels de l'art et de la littérature ; elle est cependant disponible pour une lecture littéraire, qui exige du texte qu'il soit à la fois porteur d'un sens et d'un jeu avec le matériau linguistique, dans la mesure ou loin de les effacer, elle manifeste constamment les traces de son énonciation.