Abstract FR:

Si la crise de la métaphysique semble avoir noué les conditions de possibilité d'un discours féminin à travers une critique de la subjectivité classique et la réhabilitation de la question de la différence sexuelle, on peut se demander comment les femmes ont alors investi le territoire de la philosophie. Deux auteurs, Lou Andreas-Salomé et Catherine Pozzi, nous ont ainsi permis de saisir une stratégie de subversion des catégories philosophiques par laquelle ces femmes ont certes surenchéri sur la modernité, notamment à travers une quête identitaire et anthropologique qui poursuit un travail de défection du sujet, mais sans pour autant totalement adhérer à elle, en se réappropriant une " exigence métaphysique " qui survivrait à la crise de celle-ci, à travers une co-présence de l'homme et du monde. C'est par une présence au monde renouvelée qu'elles s'engagent dans un itinéraire cosmologique où prévaut un souci du monde qu'elles savent ressourcer du côté des récits cosmogoniques primitifs ou de la Naturphilosophie, tout en étant réceptives à un imaginaire poétique par lequel elles tissent un réseau métaphorique cohérent. Leur souci cosmologique sait aussi s'approprier une épistémologie moderne grâce à un décloisonnement des savoirs, que ce soit la psychanalyse pour l'une ou la physique quantique pour l'autre, mais dont par un subtil écart elles deviennent les poètes. Dès lors font-elles entendre la modernité des variations d'un contre-chant.