Abstract FR:

"contre les oppositions binaires, la complexite" : tel est le propos central de cette these, qui, a travers l'histoire de la rhetorique europeenne tardive, medite sur le sens, les outils linguistiques de son deploiement et les incertitudes de son partage. La premiere partie est consacree au savoir rhetorique dans l'europe moderne (1598-1815), puis dans la france du xixe siecle ; car apres un flechissement pendant la revolution (1792-1802), l'enseignement de la rhetorique, restaure par napoleon, connait entre 1820 et 1850 une veritable renaissance, accompagnant l'implantation de la tribune politique en france, le renouveau de la sensibilite religieuse et le developpement de l'universite. Les "questions de rhetorique" du baccalaureat et l'epreuve de "discours" des concours maintiennent son importance jusqu'aux reformes jules ferry (1880-90). La seconde partie observe le savoir-faire rhetorique de la france moderne a travers les controverses ou s'engagent, du concile de trente a la revolution, les jesuites et les encyclopedistes ; cette etude reconstruit precisement de nombreux procedes, tels l'anatheme, l'autorite, l'allegorie, la periode, le paradoxe, l'amphidoxe et l'adoxe, et jusqu'a la "regeneration" de la langue nationale, cernant par contraste des differences fines, comme les analyses -fort differentes- du sens chez dumarsais et voltaire. La troisieme partie s'interroge sur le remploi eventuel de la tradition rhetorique dans le monde contemporain, a partir de deux domaines : la question des genres (que l'evolution des moeurs rend peu reapplicables) et l'identification qualitative et ses limites -analogie, anomalie, contre-analogie, paradiastole- qui ont encore beaucoup a nous apprendre. Ces trois regards sur la rhetorique comme theatre du sens appellent a l'ouverture vers la rhetorique comparee : autant que la science et la foi, ou l'homme et la femme, l'occident et l'orient, nous et les autres, meritent de passer des oppositions binaires a la complexite.