Abstract FR:

Dans son ~uvre historique, michelet recourt a un procede << symbolique >>, qui consiste a reveler le destin collectif non seulement a travers la vie des individus, mais surtout a travers leur mort. Cette fonction des recits de morts revet toujours une importance particuliere dans sa narration historique. Malgre l'evolution de ses conceptions de l'histoire pendant les quarante ans ou il ecrit l'histoire de france depuis le moyen age jusqu'au xixe siecle. Dans l'histoire du moyen age, l'histoire apparait comme victoire progressive de l'esprit sur la matiere, qui s'accomplit a travers diverses vicissitudes. La passion, qui garantit une renaissance au-dela de la mort, devient ainsi un schema privilegie dans son uvre. Quoique cette perspective optimiste ressemble a celle de la philosophie de l'histoire de cousin, michelet refuse le << fatalisme >> de cette doctrine, en attribuant une liberte d'action a ses personnages, et un droit de jugement a l'historien. L'histoire de son temps, surtout l'echec de la revolution de 1848, brise sa vision heureuse du progres. Des lors son histoire est remplie de morts violentes. Dans l'histoire de la revolution, la passion des revolutionnaires est brutalement interrompue par l'irruption des <<bacchanales>>. Dans l'histoire des temps modernes, des themes malefiques, comme <<loterie>>, <<corps>> et <<prison>>, reviennent entraver la resurrection des victimes innocentes. L'historien s'y fait accusateur obstine des crimes impunis. Dans la preface de 1869, michelet proclame la cloture de l'histoire de france. En unifiant l'histoire de france et sa propre histoire, il a accompli sa mission, et il a acquis le droit de mourir sans regret. Mais bouleverse par les desastres de 1870, il entreprend la suite de son uvre, l'histoire du xixe siecle, qu'il ne sait plus comment terminer. En refusant de mettre un terme a son uvre, il renonce a son propre salut. Mais en meme temps, il oppose pour la derniere fois un refus a la philosophie de l'histoire.