thesis

La concordance des temps dans les langues romanes : une spécificités de l’italien : l’expression du futur dans le passé (deux morphologies: ia/-ebbe ; aspect immanent / aspect transcendant)

Defense date:

Jan. 1, 2007

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Institution:

Paris 4

Disciplines:

Abstract EN:

The Italian language uses the compound form of the conditional in certain syntactic constructions (ex. Mi ha detto che sarebbe venuto) whereas other Romance languages use a simple form in order to express future in the past (ex. : Me dijo que vendría ; Il m’a dit qu’il viendrait, etc. ). This work comprises three parts. The first part is a review of the theoretical viewpoints offered by the grammar books and linguists with regard to this problem of the Italian syntax. Thus one of the most widely spread explanations according to which the simple form of the conditional refers to an event which has already happened whereas the compound form refers to an event which has not happened is insufficient. By drawing on examples from a large corpus of literature we are going to show that the compound form may be used in both cases. The second part gives a historical overview in which we are going to show that this phenomenon is much older than we are led to believe by the grammar books. It appeared for some time in the spoken language (14th century) and much later in the literary language (16th-17th centuries). It was under the great influence of classical authors such as Dante, Petrarca and even Boccaccio that writers remained loyal to the model of sequences of tenses, which was identical to other Romance languages and imposed by the great “trecentisti”. It was not until some writers rose against these archaic attitudes, such as Crusca for example, that this phenomenon started to appear in the literary language. We believe that its firm entry into the modern Italian literature is due to authors such as Alessandro Manzoni and Antonio Fogazzaro, who used both forms of the conditional : the first one however tended to use primarily the simple form whereas the latter very clearly reversed this tendency. Yet, Italian is the only Romance language in which from the start the verbo-temporal system recognised a “double birth of the conditional” that is to say a double morphology : (-ia), which is older and (-ebbe) which became established through the written form by the Florentine writers. More importantly, we argue that there is a fundamental difference between the conditional with the form -ia (ex : verria) and the conditional with the form -ebbe (ex : verrebbe). Their structure is not the same because the first one is built from the imperfect and the second one from the preterite. Here we are thinking of their internal structure, more precisely the position of the observer who is not the same in the two tenses. Finally, through a contrastive analysis we explain why the Italian conditional does not comply with the location of the tense of the observer, which is the case in other Romance languages, but it assumes the location of the tense of the speaker, which we are going to refer to as a “double location”, and which according to our hypothesis is due to the superposition of the two forms -ia (imperfect) and -ebbe (preterite) in the course of centuries.

Abstract FR:

L’italien recourt à la forme composée du conditionnel pour parler du futur dans le passé (ex. : Mi ha detto che sarebbe venuto) dans certaines constructions syntaxiques où les autres langues romanes usent de la forme simple (ex. : Me dijo que vendría ; Il m’a dit qu’il viendrait, etc. ). Ce travail comprend trois parties. Nous passons, tout d’abord, en revue les propositions théoriques des grammaires et des linguistes devant ce problème de syntaxe italienne. Ainsi l’une des thèses les plus répandues, selon laquelle la forme simple du conditionnel parlerait d’un événement qui s’est produit, et la forme composée d’un événement qui ne s’est pas produit, s’avère insuffisante. Par de nombreux exemples tirés du corpus littéraire, nous montrons d’ailleurs que la forme composée peut être utilisée dans les deux cas. Vient ensuite une étude historique, où nous remarquons que ce phénomène est incomparablement plus ancien que ne le croient les grammaires. Il apparaît de très bonne heure dans la langue populaire (XIVe siècle), et beaucoup plus tard dans la langue littéraire (XVIe-XVIIe siècles). C’est sous l’énorme influence des grands écrivains classiques, tels que Dante, Petrarca, et surtout Boccaccio, que les écrivains sont restés longtemps fidèles au modèle de concordance des temps -identique à celui des autres langues romanes- imposé par les grands « trecentisti ». Ce n’est qu’avec des écrivains qui se sont élevés contre ces attitudes archaïsantes -de la Crusca, par exemple- que commence l’installation du phénomène dans la langue littéraire. Son entrée définitive dans la littérature moderne en italien est, croyons-nous, due à des écrivains tels Alessandro Manzoni et Antonio Fogazzaro, qui emploient les deux formes du conditionnel : le premier emploie tout de même majoritairement la forme simple, alors que le second renverse clairement cette tendance. Or, l’italien est la seule langue romane dont le système verbo-temporel a connu -dès les origines, pour ainsi dire- une « double naissance du conditionnel », à savoir une double morphologie : (-ia), génétiquement plus ancienne, et (-ebbe) qui s’installe sous la forte empreinte des écrivains florentins. Portant notre regard sur le signifiant, nous insistons longuement sur une différence fondamentale entre le conditionnel en -ia (ex. : verria) et le conditionnel en -ebbe (ex. : verrebbe). Leur architecture n’est pas la même, car le premier est construit sur l’imparfait et le second sur le prétérit. Nous pensons à leur constitution interne, plus précisément à la position de l’observateur qui n’est pas la même dans les deux temps. Enfin, par une étude contrastive, nous expliquons que le conditionnel italien ne se contente pas du repérage sur le temps de l’observateur, comme c’est le cas dans les autres langues romanes, mais qu’il ajoute nécessairement le repérage sur le temps du locuteur, ce que nous avons appelé « double repérage », et qui est dû, selon notre hypothèse, à la superposition -durant des siècles- des deux architectures, -ia (imparfait) et -ebbe (prétérit).