La querelle des Lettres de Jean-Louis Guez de Balzac (1624-1630) : polémique, écriture et critique
Institution:
Paris 3Disciplines:
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Abstract EN:
This thesis concerns the first work by Jean-Louis Guez de Balzac, published in 1624, and the controversy that ensued. A publishing event of the 1620s, the collection of Lettres was the result of an attempt by Balzac, who was past master in the art of putting both his own person and his works on display, to be accepted as the pre-eminent orator of his time. With this displacement from the oral to the written medium, and from speech to mere letters, eloquence here became an art designed to give pleasure: it abandoned its favourite domain, political action, for the entertainment of an audience of people that frequent Court and high society. This much is demonstrated in Balzac's very style, which shows that from the constructions of classical rhetoric he mainly keeps an art of ornate discourse that enhances the refinements of an artistic form of writing that is held up as a model of prose along with that of Malherbe. Applause was, however, quickly followed by a major literary quarrel. Driven by Catholic apologists, this controversy shows the level of resistance created by Balzac's modernity, which is condemned out of respect for the Graeco-Roman inheritance, and in line with a type of religious discourse for which the culture of 'eloquence' was a sign of pride, and for which the search for new forms was a proof of freethinking. But the quarrel intensified, and went beyond the original debate about the Lettres, giving rise to a whole series of publications and encouraging a wide range of points of view. This event thus harnesses the energies of about twenty different authors, and put on show a great variety of literary careers and philosophies, a study of which allows us to seize the complex issues latent in publishing and writing practices at a period when the domain of literature and fine arts was becoming institutionalised.
Abstract FR:
Cette thèse porte sur la première œuvre de Jean-Louis Guez de Balzac, les Lettres, publiées en 1624, et sur la polémique qui suivit sa publication. Evénement éditorial des années 1620, le recueil des Lettres est le fruit d'une tentative de Balzac, passé maître dans la mise en scène de sa propre personne et de ses œuvres, pour s'imposer comme premier orateur de son temps. Déplacée de l'oral à l'écrit, du discours à de simples lettres, l'éloquence devient un art d'agrément qui déserte son terrain de prédilection, l'action politique, au profit du divertissement d'un public de courtisans et de mondains. Le style même de Balzac en est la manifestation, et montre que de l'ancien édifice rhétorique il retient surtout l'art du discours orné, qui nourrit les raffinements d'une écriture artiste donnée, en parallèle avec Malherbe, comme modèle de prose. Aux applaudissements, répond cependant très vite le scandale, et les Lettres se retrouvent pour plusieurs années au centre d'une querelle majeure. Emmenée par les apologistes catholiques, la polémique montre les résistances suscitées par la modernité balzacienne, condamnée au nom de la fidélité à l'héritage antique et d'une économie religieuse du discours pour laquelle le culte du " bien dire " est signe d'orgueil, et la recherche de nouvelles formes, preuve de libertinage. Mais la querelle s'emballe et, au-delà du débat sur les Lettres, nourrit une dynamique d'édition qui suscite les vocations les plus diverses. Mobilisant une vingtaine d'auteurs différents, bien connus pour certains (tels le P. Garasse, Théophile de Viau ou Jean-Pierre Camus), obscurs pour d'autres, l'événement met ainsi face à une grande variété d'itinéraires et d'engagements dont l'étude permet d'appréhender les enjeux complexes que portent pratiques d'écriture et de publication à une époque où s'institutionnalise l'espace des belles-lettres.