Dire je : augustinisme et rapport à soi dans la poésie spirituelle de langue française publiée entre Montaigne et Descartes (1580-1641)
Institution:
Lyon 2Disciplines:
Directors:
Abstract EN:
In my thesis I present an ethical interpretation of the spiritual poetry in the context of cultural studies. The aim is to conceive a fragment of the “pre-history” of the subject and the self, and further of the lyricism; which leads to a systematic examination of the self-fashioning, practice oriented or reflexive one, via poetic enouncement. Can poetic spiritual enunciation provide a saying I that is the basis of ethical subject (that would be a practical equivalent of Descartes’ speculative cogito, 1637, 1641)? First part, “Poetics of the Self”, investigates the language and literary tools participating on self-fashioning by the turn of the 17th century. Writing influenced by lectures of Dionysius the Areopagite employs the hermeneutic crisis initiated by Nominalism which is, however, used to express and to refer to secret, by the means of enigma and dissimilar symbol. This writing can be situated in the debates on rhetoric of person and sincerity which originate in the ecclesiastical rhetoric of Erasmus and Augustine, spread out especially by the project of Montaigne’s Essays (1580). The second part, “Politics of the Self”, shows the discursive importance of meditative Augustinianism, based on the study of circulation and poetic imitation of apocryphal Augustinian meditations from the 11th and 13th century. The stream differs from the theological Augustinianism constructed on the concept of justification. The thesis reveals the relation to the self elaborated in the context of mystical enunciation, as well as in the ethical neo-stoical enunciation. I investigate the public challenge of this personal speech and private ethics that indicate a de-politisation of royal subject by the turn of the 17th century; de-politisation that is, nevertheless, itself political.
Abstract FR:
Dans la mouvance des « études culturelles », ce travail conduit une lecture éthique de la poésie spirituelle. Le projet d’écrire un fragment de la « pré-histoire » du sujet et du moi, ainsi que du lyrisme, amène à examiner l’élaboration d’un rapport à soi pratique, voire réflexif, à travers l’énoncé poétique. L’énonciation poétique spirituelle offre-t-elle un dire je fondateur du sujet éthique (qui serait l’équivalent pratique du cogito spéculatif de Descartes, 1637, 1641) ? Un premier temps, intitulé « Poétique de soi », questionne les moyens verbaux et littéraires d’une telle élaboration de soi au tournant du XVIIe siècle. Une écriture marquée par la lecture de Denys l’Aréopagite joue de la crise herméneutique ouverte par le nominalisme, tout en l’utilisant en vue de faire signe et de référer, par l’énigme et le symbole dissimilaire, à un secret. Elle peut être inscrite dans les débats touchant une rhétorique de la personne et de la sincérité, dont sont à l’origine les rhétoriques ecclésiastiques d’Érasme et d’Augustin, relayées notamment par l’entreprise des Essais de Montaigne (1580). Un second temps, intitulé « Politique de soi », met au jour l’importance discursive d’un augustinisme méditatif, à partir de l’examen de la circulation et de l’imitation poétique de méditations augustiniennes apocryphes datant des XIe et XIIIe siècles. Ce courant diffère de l’augustinisme théologique articulé autour de la notion de justification. Nous relevons le rapport à soi qu’il établit aussi bien dans le contexte d’une énonciation mystique que d’une énonciation éthique néo-stoïcienne et questionnons les enjeux publics de la parole personnelle et de l’éthique privée. Elles indiquent une dépolitisation elle-même politique du sujet royal au tournant du XVIIe siècle.