L'être et la lettre : la tragédie de l'écriture dans la fiction de Joseph Conrad
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Lyon 2Disciplines:
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Au travers de certains concepts tragiques fondateurs définis par la "Poétique" d'Aristote, nous nous proposons d'analyser dans les oeuvres majeures de Joseph Conrad le rapport dialectique entre l'être et la lettre, fondé sur la remise en cause d'une vision esthétique classique. Notre première partie sera consacrée à une analyse du substrat esthétique classique à partir de la thématique du voyage qui symbolise le déplacement de la réalité vers la fiction, au profit du transfert que permet le mouvement métaphorique, en quête d'un surplus de sens devant déboucher sur l'aperception de l'essence. Mais les contours de l'espace esthétique classique s'estompent progressivement. Le voir et le savoir sont tenus en échec, marquant l'effondrement de l'épistémè traditionnelle, tandis que le sujet perd sa transparence et sa densité. Temps et temporalité font l'objet d'un traitement disruptif qui ruine le schéma téléologique classique. C'est en définitive l'ensemble du projet esthétique qui est radicalement réinterrogé, l'esthétique de la "représentation" laissant place à celle de la "présentation" qui marque une dé-théologisation du processus mimétique. Par delà l'effondrement du thétique toutefois, la fiction conradienne articule le passage du Savoir au Ça-voir, propre à la reconstruction tragique, qui dévoile la tragédie de notre "être-dans-les-signes". Cette littérature se fait symptôme d'une modernité qui vit un moment de repli du signe sur lui-même, déréalisant le monde vers lequel il était censé faire signe, ouvrant à l'aperception du Réel lacanien. Enfin, nous tenterons de voir comment cet effondrement ontologique mène à la reconstruction d'un "au-delà de l'être" marqué par l'émergence de l'éthique, associant processus cathartique et élaboration d'une nouvelle scène littéraire. Le renoncement au spéculaire permet le surgissement d'un nouveau mode représentatif tandis qu'un discours épuré donne au lecteur l'occasion d'éprouver "le plaisir du texte"