Pour une poétique de la traduction de soi : lecture bilingue et génétique des textes courts auto-traduits de Samuel Beckett (1946-1980)
Institution:
Bordeaux 3Disciplines:
Directors:
Abstract EN:
At the juncture of several languages and idioms - french, english, anglo-irish - and of several domains of research and textual analysis: literature and translation theory on the one hand, stylistics, psychoanalysis and variorum study on the other, this thesis aims at delineating how samuel beckett rewrites his texts when he self-translates them. The corpus, comprising most of the + shorter; texts, both prose and drama, spans the years 1946-1980. The research, which relies mainly on a comparative reading of the twin versions, while revealing the modified topography of the self-translated text, also takes greatly into account the bilingual draft versions which are studied in detail in the annexed document (vol. Ii). After analysing the psychological issues linked to the fact of rewriting in another language, the focus is put on the evolution of beckett's style. As a self-translator, beckett works on the two axes of discourse, sensitive to the rhythmic and aural aspect of his texts. The art of self-translation is a parodic art, as is the author's style: a combinatory art, it is also a disjunctive art; an art of inflexion, it relies upon a droll humour as well as on a harsh pessimism; an art of lessening, it prefers to be laconic, while liking to create a rich discordant polyphonic language with foreign accents, keen on contradiction, word-play, and cliche. This paradoxical economy follows the lines of a schizomorph structure. It is that of the freudian unconscious which surfaces in the discourse of a psychotic subject. Thus, each text exists conjointly with its double, offering two displaced, de-centred visions of the ego and of its relationship to the outer world and to himself. That is why it is possible to say that this poetics of self-translation (meaning + way of doing ;) defines a poetics of translation of the self (meaning + motif ; and + operating programme ; of the writer). In a state of helplessness, beckett's narrators keep stumbling on the signifiers of madness and death. Even if they happen to approach them through repetition in the other language, they part from them inevitably, to and fro at each new version of the texts, experiencing the gist of tragedy.
Abstract FR:
Au croisement de plusieurs langues et idiomes - le francais, l'anglais et l'anglo-irlandais - et de plusieurs domaines de recherche et techniques d'analyse textuelle : litterature et traductologie d'une part, stylistique, psychanalyse et genetique d'autre part, cette these cherche a retracer les procedes de reecriture mis en oeuvre par samuel beckett lorsque se dernier s'auto-traduit. Le corpus, qui comprend la plupart des textes dits + courts ; de beckett, nouvelles et pieces, couvre les annees 1946-1980. L'etude, qui s'appuie essentiellement sur une lecture comparee des versions jumelles, laquelle revele la topographie modifiee du texte auto-traduit, prend aussi largement en compte les avant-textes bilingues qui font l'objet d'une attention particuliere en annexe. Apres une analyse des implications psychologiques de la reecriture dans une autre langue, l'attention se porte sur l'evolution du style. Beckett auto-traducteur travaille sur les deux axes du discours, attentif aux rythmes et aux sonorites. L'art de l'auto- traduction est un art parodique comme le style de l'auteur : art combinatoire, il se fait egalement art de la disjonction ; art de l'inflexion, il articule un humour drolatique avec un pessimisme des plus drus ; art de l'amoindrissement, il privilegie le laconisme, tout en aimant creer une langue polyphonique, riche et discordante, aux accents etrangers, appreciant contradictions, jeux de mots et cliches. Cette economie paradoxale suit les lignes de force d'une structure schizomorphe. Elle est celle de l'inconscient freudien qui refait surface dans le discours du psychotique. Chaque texte de beckett existe donc en concurrence avec son double, offrant deux visions decalees, decentrees du moi et de son rapport au monde et a lui-meme. C'est en ce sens que l'on peut dire que cette poetique de l'auto-traduction (au sens de + art de faire ;) definit une poetique de la traduction de soi (au sens de + motif ; et de + programme operatoire ; de l'auteur). En etat de + desaide ;, les narrateurs beckettiens achoppent toujours sur les signifiants de la folie et de la mort. Meme s'ils s'en rapprochent parfois lors de la redite dans l'autre langue, ils s'en ecartent immanquablement dans un jeu de va-et-vient qui se poursuit a chaque nouvelle version des textes, faisant l'experience du tragique.