Ecriture et déracinement : Canetti, Nabokov et Yovkov, ou le "métier du poète" en exil
Institution:
Paris 3Disciplines:
Directors:
Abstract EN:
Approached from the point of view of the creator resisting to the common places (historic determinism, “model” of reader’s reception it calls, nostalgia and “sweet home”), the phenomenon of exile is shown in its progress towards the literary space. There is an original experience of banishment which does not recover the exile period of Elias Canetti (1905-1994), Vladimir Nabokov (1899-1977) and Yordan Yovkov (1880-1937). The exile like determinism and the artistic gesture are in confrontation: while the History fix and close the spatio-temporal representations, the writer is a creator of spaces. Identity metamorphosis and space strangeness becomes the nodal point of an experience of ex-patriation founded on the migrant perception of space and of human being.
Abstract FR:
À travers le dialogue inédit entre Elias Canetti (1905-1994), Vladimir Nabokov (1899-1977) et Yordan Yovkov (1880-1937), cette étude s’est montrée attentive au geste créateur en situation d’exil. Pour autant, l’expérience du déracinement dont il est question non seulement ne recoupe pas forcément la période d’exil, mais s’avère être rétive à toutes les « machines binaires » (Deleuze) que les réceptions nationales lui infligent. Déterminismes historiques et identité artistique s’affrontent : alors même que les migrations forcées découvrent aux écrivains les mécanismes de la haine et dressent des frontières, la construction d’une identité artistique passe par l’ouverture de l’espace et (plus loin) par le dépaysement de la pensée et des sensibilités. Vue par le prisme de ce déracinement rebelle aux conventions du thème, l’histoire intime rivalise avec l’Histoire : le topos de la nostalgie du lieu natal est évincé par le désir d’absence, et l’éloignement des lieux est hissé au rang de moteur de l’écriture. Dans un éventail de genres, de l’autobiographie à la fiction, en passant par les récits, les réflexions et la paralittérature, le phénomène de l’exil est suivi pas à pas dans son cheminement vers l’espace littéraire. Car le « métier du poète » est celui du créateur d’espaces. Il saisit les identités à l’instant de leur métamorphose, et les villes traversées dans leur fugue assoiffée. L’expérience du dépaysement s’ouvre alors sur ce « territoire de l’homme » que Canetti appelait de ses vœux, et qui se dessine dans la perception migrante de l’espace et l’être.