thesis

"Rire et douter" : lucianisme, septicisme(s) et pré-histoire du roman européen (XVème -XVIIIème siècle)

Defense date:

Jan. 1, 2008

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Institution:

Paris 7

Disciplines:

Abstract EN:

Possibly the fînest of all Menippean satirists in antiquity and certainly the most influential from the Renaissance on to the Enlightenment, Lucian of Samosata used to satirize dissenting philosophers. Following his example, Alberti, Erasmus, Quevedo, Cyrano, Swift, Voltaire, Sterne and niany more (Galateo, Vives, Doni, Des Periers, Cunaeus, Saavedra Fajardo, Cavendish, Fontenelle, Prior, Peacock) intended to satirize the scholarly disputes of their time, targeting fanciful metaphysicians, masters of the humanist encyclopaedia, quarrelsome theologians, dogmatizing pedants, minute historiographes, experimental scientists or systematic philosophers. The first part of our study deals with the forms ma functions of satire during the Renaissance period: lucianic incredulity, sceptical doubt, cynical anti-intellectualism and the Christian reproof of libido sciendi ail concur in the jesting criticism of the vanity and uncertainty of science. The second part shows the progressive marginalization of this type of serio-comical writing, now perceived as "literary", during the early-modern period (XVIIth - XVIIIth century). Ultimately absorbed by the novel, this tradition of serio-comical fiction was originally very distinct from it: its main aim was to criticize the excesses of intellectuality and to meditate on the limits of knowledge. Sometimes, authors used it to express an openly sceptical point of view, confessing their ignorance to set an example. Their fanciful creations should not be detached from their epistemological point: when fiction treats knowledge as fables and scholars as fiction writers, laughing and doubting are often the two sides of the same coin.

Abstract FR:

Peut-être le plus grand auteur ménippéen de l'Antiquité, sans doute le plus influent de la Renaissance aux Lumières, Lucien de Samosate satirisait les philosophes discordants. Sur son exemple, Alberti, Érasme, Rabelais, Quevedo, Cyrano, Swift, Voltaire, Sterne et bien d'autres (Galateo, Vives, Doni, Des Périers, Cunaeus, Saavedra Fajardo, Cavendish, Fontenelle, Prior, Peacock) satirisent les disputes savantes de leur temps, prenant pour cibles les métaphysiciens chimériques, les maîtres humanistes, les théologiens querelleurs, les pédants qui dogmatisent, les historiographes minutieux, les savants expérimentaux ou les philosophes systématiques. Notre thèse parcourt ce vaste corpus suivant un plan chrono-thématique : la première partie s'attache aux formes de la satire à la Renaissance, quand l'incrédulité lucianesque, le doute sceptique, l'anti-intellectualisme cynique et la réprobation chrétienne de la lidido sciendi se conjuguent dans la critique railleuse de la vanité et de l'incertitude affectant les discours savants. La seconde montre la marginalisation progressive de ce type d'écriture serio-comique, désormais perçu comme « littéraire », au cours des XVIIe et XVIIIe siècles. Destinée à être absorbée par le roman, cette tradition de la fiction pré-moderne permet de critiquer l'excès de savoir et d'intellectualité, de méditer en moraliste sur les limites de la connaissance, parfois de reconnaître humblement son ignorance pour la donner en exemple. Pour être comprise, l'invention fantaisiste ne doit pas être détachée de son enjeu épistémologique : quand la fiction traite les savoirs de fables et les doctes de fabulateurs, le rire est souvent l'autre face du doute.