Le Moyen-Age de Chateaubriand : esthétique, éthique et idéologie
Institution:
Paris 4Disciplines:
Directors:
Abstract EN:
Starting from the presupposition that Chateaubriand rehabilitated the Middle Ages, i examine in his work the evolution of two themes which were treated as rather marginal in the 18th century, but then came to fruition in the Romantic period : the Gothic and chivalry. In doing so, I seek to show how the Revolution, which Chateaubriand despised only for its crimes against ancient France, paradoxically made him into the disseminator of a culture to which he had no innate inclination. Central to a gothic imagination which combines imagery from Breton landscapes and arguments from the Gothic revival, the cliché of the gothique sylvestre, an intuitive theory which prevents one from having to think as a specialist, first serves the purpose of a re-sacralization of a profaned cathedral, and then, after 1830, moves towards a romantic aesthetics of profusion and enormity. Parallel to this, as a model of greatness extended to a world of pygmies. But the ruin determines the emotion. If Chateaubriand brings into his "cathedral autobiography" the commited figure of the knight-writer and integrates courtly ethics into his amorous fantasies, the Middle Ages, set at the distance through irony and emptied out by ghostly stagings from the gothic novel, is denounced as a reactionary aesthetics and ideological model. Torn between honor and freedom, the Gothic and the Classic, Chateaubriand finally stops at the Renaissance which , as conveyed in the figures of Chambord and François Ier, carries out the ephemerical fusion of principles and styles and, above all, by letting the past dye peacefully and by preserving the continuity of history, opposes the bloody advent of modernity with the miracle of a painless Revolution.
Abstract FR:
Partant du présupposé que Chateaubriand a réhabilité le Moyen Age, nous étudions dans son œuvre le devenir de deux objets valorisés de façon marginale par le XVIIIe siècle et appelés à s'épanouir à l'époque romantique : le gothique et la chevalerie, en montrant comment la Révolution, rendue odieuse à l'écrivain par ses seuls crimes contre l'ancienne France, a fait de lui le passeur paradoxal d'une culture pour laquelle il n'avait pas d'inclinations natives. Au cœur d'un imaginaire gothique qui combine les images du paysage breton et les arguments du Gothic revival, le cliché du gothique sylvestre, théorie intuitive qui dispense de penser en spécialiste, est d'abord mis au service d'une re-sacralisation de la cathédrale profanée puis tiré après 1830 vers une esthétique romantique de la profusion et de l 'énormité. Le mythe chevaleresque hérité du courant troubadour est parallèlement retravaillé comme idéal christique, poésie de l'honneur et de la fidélité, modèle de grandeur tendu à un monde de pygmées. Mais la ruine conditionne l'émotion. Si Chateaubriand accueille dans son autobiographie-cathédrale la figure engagée de l'écrivain-chevalier et intègre l'éthique courtoise à ses fantasmes amoureux, le Moyen-Age, distancié par l'ironie et déréalisé par des mises en scènes fantomatiques venues du Gothic novel, est dénoncé comme modèle esthétique et idéologique réactionnaire. Tiraillé entre l'honneur et la liberté, le gothique et le classique, Chateaubriand s'arrête finalement à la Renaissance qui accomplit, sous le signe de Chambord et de François Ier, la fusion éphémère des principes et des styles et surtout, en laissant le passé mourir pacifiquement et en préservant la continuité de l'histoire, oppose à l'avènement sanglant de la modernité le miracle d'une Révolution sans douleur.