La notion de fin dans "A Rebours" de Joris-Karl Huysmans
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Abstract EN:
The notion of end is from the outset defined as spatio-temporal. It expresses the limit (border and boundary, fniteness and finality), and conjures up desires to cross this limit. Our research aims to consider the novel A Rebours in the light of this notion, so as to emphasize the event narrated by Huysmans. What comes to an end with the departure into retirement is the century, that is to say, the world. The character who takes his leave has done with nature, and with the values of modernity ; in this sense A Rebours is indeed the turn-of-the century novel par excellence. Yet this is no more than the prelude to the event. Settling in the retreat at Fontenay imposes a redefinition of space, which will from now on be internalized as "here". Des Esseintes tries out a whole range of devices, the most important being the radical solitude of his new existence. He weaves other teleological threads that reveal the principle of pointlessness. Invisible from here onwards, he comes to terms with the prerogatives of a decadent logic, and turns to good account a desire for possibilities where the full sovereignty of the self is established. Cut off, beyond genealogy, beyond norms, he plays incognito. Basking in fickle leisure, the character, mask and true face, accedes single-handedly to the highest pinnacle of internal freedom, and becomes king. And yet, this supreme coronation of the subject os also a dethronement. The event emerges thus : Des Esseintes is stripped of his human identity. He is "disessentialized". Individuality and control are refused him from the moment that space-time (the "here and now") dissolves. In fact place implodes, being all and everywhere ; because it is lived as the "eternity of (n)ever", the present only, brings suffocating boredom. It is only at the end of the adventure, thanks to a disappointing apocalypse, that Des Esseintes once more finds the road outside (the "over there") and the horizon of History. Such is A Rebours's contribution to modernity, a contribution that Huysmans' other works deepen or rectify - in a style that is still naturalist, but racked with Mallaméan anxiety, Huysmans suggest that nihilism lies in wait for the all-powerful. He takes language to the limit of its powers and, offering comprehension of the world of "metaphysis", attempts to represent the secret of separation. Or rather, he provides us with the "outlines".
Abstract FR:
La notion de fin est d'emblée définie comme spation-temporelle. Elle exprime la limite (frontière et confins, finitude et finalité), et convoque les aspirations à l'au-delà de cette limite. Notre recherche se propose d'envisager le roman "A Rebours" au regard de cette notion, afin de mettre en évidence l'évènement dont Huysmans fait le récit. Ce qui prend fin avec le geste de départ vers une retraite, c'est le siècle, c'est-à-dire le monde. Le personnage qui s'en sépare en finit avec la nature, et avec les valeurs de la modernité ; en ce sens, "A Rebours" est bien le roman fin de siècle par excellence. Mais ceci n'est encore que prélude à l'évènement. L'installation dans la thébaïde de Fontenay instaure la refonte de l'espace désormais intériorisé en un "ici". Des Esseintes y expérimente toute une gamme d'artifices, au premier rang desquels la solitude radicale de sa nouvelle existence. Il tisse de nouveaux fils téléologiques qui déroulent le principe de gratuité. Désormais invisible, il assume les prérogatives d'une logique décadente, et fait valoir un désir de possibilités où s'affirme la pleine souveraineté du moi. Séparé, hors généalogie, hors normes, il joue incognito. Baignant dans le loisir capricieux, le personnage, masque et figure, accède solitairement à la plus haute liberté intérieure, et devient roi. Pourtant ce suprême couronnement du sujet est aussi une destitution. Ainsi, l'événement se profile : des Esseintes est défait de son humaine identité. Il est "désessentialisé". Individualité et maîtrise lui sont refusées dès lors que l'espace-temps (l' "ici-maintenant") s'effondre. Le lieu implose en effet d'être tout et partout ; pour être vécu sous le mode de "l'éternité du jamais", le présent n'apporte que l'asphyxie de l'ennui. Ce n'est qu'à la fin de l'aventure, à la faveur d'une apocalypse décevante, que des Esseintes retrouvera le chemin du dehors (le "là-bas") et l'horizon de l'Histoire. Tel est l'apport d'A Rebours à la modernité, apport que les autres oeuvres de Huysmans approfondissent ou rectifient : sur un mode encore naturaliste, mais travaillé par l'inquiétude mallarméenne, Huysmans suggère que le nihilisme guette le sujet omnipotent. Il porte le langage à la frontière de ses pouvoirs et, proposant la saisie du monde de la "métaphysis", il tente une représentation du secret de la séparation. Ou plutôt il nous en livre les "reliefs".