L'allégorie de l'Europe en France de la Renaissance à la Révolution : iconographie d'un objet politique
Institution:
Université Grenoble Alpes (ComUE)Disciplines:
Directors:
Abstract EN:
The iconography of Europe, the fourth part of the world known from the Renaissance, is a fundamental source for understanding the idea of Europe since ancient times. Indeed, its symbolic language expressed by the images - flat or in relief - is rich and varied, and adds to the history of the idea of Europe innumerable unpublished chapters which complete those which were delivered to us by the written sources. The figure of Europe, by its political, religious or mercantile meanings, has been a craze for artists, princes and the public of the arts - of all the arts - for centuries. But this iconographic theme is still little studied and there remains a vast field of exploration of the idea Europe by images, particularly for France, from the Renaissance to the Revolution.Antiquity has, to date, only one example of allegory of Europe, and the Middle Ages, two examples. The medieval tradition, however, elevates two prominent biblical characters into incarnation of Europe. Japheth, one of the three sons of Noah, and Melchior, one of the three magi.From 1492, the great discoveries incite to a new allegorical language: that of the four parts of the world. Europe first takes the form of an anthropomorphic queen, a Marian incarnation that places the figure of Europe in the register of the sacred, religious and political. From 1520, festivals and entries educate the spectator who is shown his first symbolic representation of Europe. The art of print spreads across borders a succession of new iconographic models. Finally, the contribution of cartography was also fundamental to spread allegories of Europe, the first of the four parts of the world.From the sixteenth century to the eighteenth century, all arts display a symbolic language rich in teachings on the idea of Europe. His iconography illustrates themes as varied as the memory of the Roman Empire, the domination of the world, a sovereign Eurocentrism, a proximity to Asia, a bulwark at the Turkish peril, the exoticism of distant discoveries and travels, the virtues trade, or even war, or peace, etc. A majority of artists will represent Europe for two centuries according to the iconologia of Cesare Ripa and its adaptations like that of Jean Baudoin in France in 1643. It was not until the eighteenth century that a new generation of theorists of the iconology, and inventive artists, renew the allegorical language of Europe.Of all the meanings of Europe, two of them occupy a preponderant place. The representations of Europe are first and foremost images serving the propagation of the faith, the universality of Catholicism and its conquering march, and the Jesuits in particular. However, there is no question of hagiography or pious image. Europe, if it reaches the register of the saint and the sacred, and decorates consecrated places, never becomes a religious figure.The image of Europe is also a propaganda tool for princes, from England to Spain, with iconographic constancy. In France, from the reign of Henry IV, it occupies an important place in the neighborhood of kings in their portraits or allegorical representations of their power. During the reign of Louis XIII, Louis XIII and Louis XIV who support the use of the figure of Europe to animate their personal political propaganda. The century of Louis XV is truly the golden age of the decorative arts and motif of the four parts of the world in the form of feminine allegories, then very fashionable. This enthusiasm continues under Louis XVI, but Europe now conveys the universalist ideas of the Enlightenment. In France, the Revolution puts an end to the allegorical expressions of Europe.
Abstract FR:
L’iconographie de l’Europe, la quatrième partie du monde connu à partir de la Renaissance, est une source fondamentale pour comprendre l’idée d’Europe depuis l’Antiquité. En effet, son langage symbolique exprimé par les images – à plat ou en relief – est riche et varié, et ajoute à l’histoire de l’idée d’Europe d’innombrables chapitres inédits qui complètent ceux qui nous ont été livrés par les sources écrites. La figure de l’Europe, par ses acceptions politiques, religieuses ou mercantiles, a fait l’objet d’un véritable engouement de la part des artistes, des princes et du public des arts - de tous les arts - durant des siècles. Or ce thème iconographique est encore peu étudié et il reste donc un vaste champ d’exploration de l’idée Europe par les images, particulièrement pour la France, de la Renaissance à la Révolution.L’Antiquité n’a livré, à ce jour, qu’un exemple d’allégorie de l’Europe, et le Moyen Âge, deux exemples. La tradition médiévale érige cependant en incarnation de l’Europe deux personnages bibliques de premier plan. Japhet, l’un des trois fils de Noé, et Melchior, l’un des rois mages.Dès 1492, les grandes découvertes incitent à un langage allégorique nouveau : celui des quatre parties du monde. L’Europe prend d’abord la forme d’une reine anthropomorphe, incarnation mariale qui inscrit la figure de l’Europe dans le registre du sacré, religieux et politique. Dès 1520, fêtes et cérémonies éduquent le spectateur à qui l’on montre sa première représentation symbolique de l’Europe. L’art de l’estampe diffuse par-delà les frontières une succession de modèles iconographiques nouveaux. Enfin, l’apport de la cartographie a également été fondamental pour diffuser des allégories de l’Europe, première des quatre parties du monde.Du XVIe siècle au XVIIIe siècle, tous les arts déploient un langage symbolique riche d’enseignements sur l’idée d’Europe. Son iconographie illustre des thèmes aussi variés que le souvenir de l’Empire romain, la domination du monde, un européocentrisme souverain, une proximité avec l’Asie, un rempart au péril turc, l’exotisme des découvertes lointaines et des voyages, les vertus du commerce, voire de la guerre, ou la paix, etc. Une majorité d’artistes vont représenter l’Europe durant deux siècles selon l’Iconologia de Cesare Ripa et ses adaptations comme celle de Jean Baudoin en France en 1643. Il faut attendre le XVIIIe siècle pour qu’une nouvelle génération de théoriciens de l’iconologie, et des artistes inventifs, renouvellent le langage allégorique de l’Europe.De toutes les acceptions de l’Europe, deux d’entre-elles occupent une place prépondérante. Les représentations de l’Europe sont d’abord des images au service de la propagation de la foi, de l’universalité du catholicisme et de sa marche conquérante, des jésuites en particulier. Pour autant, il n’est pas question d’hagiographie ni d’image pieuse. L’Europe, si elle accède au registre du saint et du sacré, et décore des lieux consacrés, ne devient jamais une figure religieuse.L’image de l’Europe est aussi un outil de propagande pour les princes, de l’Angleterre à l’Espagne, avec une constance iconographique. En France, à partir du règne d’Henri IV, elle occupe en particulier une place importante au voisinage des rois dans leurs portraits ou des représentations allégoriques de leur pouvoir. Durant le règne de Louis XIII, de Louis XIII et de Louis XIV qui soutiennent l’usage de la figure de l’Europe pour animer leur propagande politique personnelle. Le siècle de Louis XV est véritablement l’âge d’or des arts décoratifs et du motif des quatre parties du monde sous la forme d’allégories féminines, alors très à la mode. Cet engouement perdure sous Louis XVI, mais l’Europe véhicule désormais les idées universalistes des Lumières. En France, la Révolution met un terme brutal aux expressions allégoriques de l’Europe.