Luis Buñuel : le jeu et la loi
Institution:
Paris 10Disciplines:
Directors:
Abstract EN:
The cutting of an eye in "un chien andalou" and the scandal about "l'âge d'or" show that right from his earliest films, Luis Buñuel has been involved in disruption. But what does disruption lead to? To answer this question, it was proposed to examine how Buñuel handles order in his work, by searching for logical, coherent systems in three of his films, "la voie lactée", "le charme discret de la bourgeoisie", and "le fantôme de la liberté". These films are shown to be informed by a play-principle and to use a strategy based on paradox. Here, law and order have certainly not been banished: they are constantly being referred to, only to be infringed. The play-principle is described, taking as an example a passage (the prologue to fantôme de la liberté) which is discussed as a whole; various instances of order occurring in the three films are then examined. These films at first seem to obey usual conventions of the cinema this impression is then exploded. The film narrative is disrupted, and the presentation of events no longer obeys the conventions (distinctions between reality and imagination are abolished, and the very existence of truth is questioned). Lastly, we considered Buñuel’s social criticism, and his presentation of the "author". Here coherence is nearly achieved, but it is not permanent. At none of these levels is order therefore maintained: it is always either illusory or provisional. All of Buñuel’s work abounds in paradoxes of various kinds: it is probably thanks to this strategy that he has abandoned neither the cinema nor disruption.
Abstract FR:
L'œil tranche d'un chien andalou, le scandale de l’âge d'or : c'est sous le signe de la rupture que se place d'emblée le cinéma de Luis Buñuel. Mais que peut-il y avoir au-delà de la rupture ? Pour répondre, l'enquête se propose de cerner le rapport à l'ordre du cinéma de Buñuel, en recherchant dans son œuvre logiques et cohérences, à partir d'un corpus restreint à trois films : la voie lactée, le charme discret de la bourgeoisie et le fantôme de la liberté. Sont mis en évidence une stratégie de caractère paradoxal et un principe de jeu : les films ne se situent pas en marge de la loi ; au contraire, ils ne cessent de la designer, mais pour l'enfreindre. La description de ce jeu se fait d'abord sur un exemple considère dans sa globalité (le prologue du fantôme de la liberté) ; elle se poursuit par l'examen des divers principes d'ordre auxquels se réfèrent les films. Le premier constat est celui d'une apparente conformité aux cadres familiers de la fiction cinématographique. Que Buñuel fait ensuite exploser : explosion du récit (notamment par une stratégie spécifique de "perversion de l'unité"), dérèglement de l'énonciation (interdiction du partage entre réel et imaginaire, mise en cause de la notion de vérité). Ultimes recours : la critique sociale et l'"auteur". La cohérence est alors très proche, sans être cependant définitive : le discours critique s'ouvre à la contradiction, et l'auteur à la fois s'exhibe et se dérobe. Aucun ordre ne fonctionne donc autrement que de façon illusoire ou provisoire. C'est sans doute cette stratégie paradoxale, dont l'ensemble de l'œuvre bunuelienne offre des exemples innombrables et divers, qui a permis au réalisateur de ne renoncer ni au cinéma ni à la rupture, et de poursuivre une entreprise originale, dans laquelle il retrouve ses origines et rencontre son temps.