"Races guerrières" : armée, science et politique dans l'empire colonial français (années 1850-1918)
Institution:
Paris 1Disciplines:
Directors:
Abstract EN:
Theorized in 1910 by general Charles Mangin, who advocated the recruitment of a Force noire in French West Africa, the races guerrières category was used in France, between the 1850s and the end of the First World War, to designate colonized groups deemed especially warlike and prone to military service. This dissertation traces the emergence of this unique military and ethnographic category, during the second part of the XIXth century. It studies the ways in which it was put into practice, its imperial and transimperial circulations, as well as the role played by the races guerrières themselves in the construction of the category. Military archives, among which Mangin’s files, colonial officers and soldiers’ writings, and a selection of scientific sources offer insights into the internal definition of races guerrières, and its connection with races non guerrières. Although colonial officers and the military presented it as a recruitment tool, the races guerrières category was very unstable and was never used as a precise guide to select indigenous recruits. However, it gave birth to the ambiguous figure of the native soldier, both reassuring and threatening. The experience of the First World War, during which the category was first put to the test on European ground, offered both a confirmation and a refutation.
Abstract FR:
Théorisée en 1910 par le général Charles Mangin dans le cadre du projet de recrutement d’une « force noire » en Afrique occidentale, la catégorie de « race guerrière » est utilisée en France, entre les années 1850 et la fin de la Première Guerre mondiale, pour désigner certaines populations de l’empire colonial français qui possèderaient des aptitudes particulières à la guerre et au métier militaire. Cette thèse retrace l’émergence, dans la deuxième moitié du XIXe siècle, de cette catégorie originale de l’ethnographie militaire. Elle interroge ses éventuelles applications, ses circulations à une échelle impériale et transimpériale, ainsi que le rôle joué par les populations désignées comme « races guerrières » dans la construction de la catégorie. Les archives militaires, celles du général Mangin, les écrits des officiers et des soldats français servant dans l’empire, et un corpus de sources savantes permettent d’étudier les différentes composantes de la catégorie de « race guerrière » et la manière dont elle se construit en lien et en opposition avec la catégorie des « races non guerrières ». Présentée par les officiers coloniaux et l’institution militaire comme un outil du recrutement, la catégorie de « races guerrières », éminemment labile, n’a en réalité jamais constitué un guide précis de sélection des recrues. Elle donne en revanche naissance à la figure ambiguë du soldat indigène, à la fois menaçante et rassurante. Enfin, l’expérience de la Première Guerre mondiale, qui constitue la première mise à l’épreuve sur le sol européen, de la catégorie de « race guerrière », lui apporte à la fois une confirmation et un démenti.