Abstract EN:

Nous avons exploité les papiers de famille, les sources manuscrites publiques et les sources imprimées. La noblesse de la Somme est inégalement touchée par la révolution ; elle sait utiliser à son profit la législation et rétablit rapidement ses positions matérielles. Les femmes jouent, entre 1791 et 1820, un rôle de premier plan, les unes pour défendre et restaurer les patrimoines, les autres comme fondatrices des congrégations enseignantes. Au XIXe siècle, ce groupe social, limité à deux cent soixante familles, et peu renouvelé par les anoblissements du 1er empire et de la restauration, se transforme en une caste locale qui pratique une sociabilité délibérément sélective, défend les mêmes principes, renforce sa cohésion par les stratégies matrimoniales et éducatives. Grands propriétaires prudents et économes, les châtelains picards savent, dès le milieu du siècle, se tourner vers les placements boursiers mais participent peu à la modernisation économique, soucieux de se démarquer nettement des autres notables, ils reconnaissent pourtant certaines valeurs de la société bourgeoise, ces gentilshommes terriens se passionnent plus pour la chasse au loup ou au lièvre que pour la cause du roi et du pape et ne se mobilisent que pour soutenir l'action des jésuites. Quel que soit le régime, ils ne font qu'exceptionnellement arrière dans l'armée ou la haute administration et ne cherchent pas à forger l'avenir. Leurs relais d'influence sont le conseil général, les comices agricoles et les conférences de Saint-Vincent-de-Paul. Apres 1885, la noblesse locale s'efface politiquement devant les nouveaux notables républicains mais continue d'encadrer la paysannerie jusqu'à la première guerre mondiale.