Abstract FR:

Les inscriptions romaines mentionnent parfois des individus qui indiquent leurs compétences intellectuelles, en particulier la maîtrise de l'éloquence et de la philosophie. Ces individus s'identifient en quelque sorte à des figures d'intellectuels. L'étude porte sur plusieurs d'entre elles (l'orateur, l'avocat, le rhéteur et le philosophe) à partir de questions soulevées par des inscriptions datées entre les Ier et VIe s. Ap. J. -C. L'espace considéré est le monde provincial d'Occident afin de déterminer si les représentations sociales évoluent du centre à la périphérie. En conclusion, l'orateur est un véritable modèle social: se revendiquer tel n'était pas seulement une question d'affirmation de l'éloquence mais définissait une situation sociale très contraignante. Malgré certaines transformations, ce modèle a conservé toute sa valeur jusqu'aux Ve/VIe siècles. Etroitement associée à celle de l'orateur, la figure du rhéteur devient progressivement, elle aussi, un modèle très valorisé. Le philosophe est quant à lui un modèle alternatif d'origine grecque qui n'arrive pas à s'imposer dans le monde occidental autrement que de manière marginale. Les inscriptions semblent en revanche indiquer qu'il n'existe pas vraiment une figure de l'avocat romain qui soit fondée sur une compétence intellectuelle comme l'éloquence, et encore moins un modèle de l'avocat romain. Les périphéries latines ont par ailleurs repris les modèles romains sans vraiment les altérer. A partir du IVe siècle, ces modèles subissent la concurrence des modèles des barbares et des chrétiens. Ces derniers, en particulier, entreprennent consciencieusement d'éradiquer les anciens modèles pai͏̈ens pour les remplacer par leurs propres modèles. Les compétences intellectuelles qui sont associées aux vieux modèles antiques perdent donc leur caractère valorisant: ayant perdu l'essentiel de leur valeur sociale, elles déclinent donc dans la nouvelle société occidentale chrétienne.