Espace sacré, espace profane : le territoire de la Grande Chartreuse : fin XVIe siècle – fin XVIIIe siècle
Institution:
Université Pierre Mendès France (Grenoble)Disciplines:
Directors:
Abstract EN:
Since it was born in the XIth century, the Grande Chartreuse's main caracteristic consists in its original institution, the "Désert". Isolated by sacred boundaries, this territory ensures the eremitism ideal of a small community, componed of fathers, brothers, and laics servants, and provides its resources. From the end of the XVIth century, the Grande Chartreuse monastery enlarge its community so as to comply with the Council of Trent's purposes. With this policy the pression on the Désert resources increases drastically. At the beginning of the XVIIth century, its leaders decide to diversificate the incomes from the material resources, and the monastery becomes a great landlord all over the mountains of Chartreuse. The metallurgic production of the Grande Chartreuse starts being industrially efficient under the influence of Daliès de La Tour, who promotes Colbert economic policy in the Dauphiné. Forests are being systematically exploited and the mountain is being managed. Both situations lead in an openness to the world while the monastery starts attracting many tourists. Meanwhile there is no secularization, and the Grande Chartreuse territory keeps its sacred dimension, reinforced by the Counter Reformation's efforts to impose a new style of religious belief and practice. During the XVIIIth century, conception of nature is deeply changing and introduces new ways of sacralization. This exemple of the Grande Chartreuse underlines the connections between sacred and profane dimensions during the modern time.
Abstract FR:
Fondée au XIe siècle, la Grande Chartreuse se caractérise par une institution originale, le Désert. Ce territoire isolé du monde par des limites privilégiées joue à la fois le rôle d'espace tampon au service d'un idéal érémitique, et de réservoir de ressources destinées à assurer la subsistance d'un groupe restreint, composé de pères, de frères et de serviteurs laïcs. A la fin du XVIe siècle, le monastère de la Grande Chartreuse adopte une politique post-tridentine d'accroissement de ses effectifs, qui se traduit par une pression accrue sur les ressources de son territoire. Dès le début du XVIIe siècle, les équipes dirigeantes entreprennent de diversifier les revenus du temporel, en opérant une série d'investissements fonciers à l'échelle de l'ensemble du massif. Influencés par Daliès de La Tour, promoteur du colbertisme en Dauphiné, les religieux relancent leur production métallurgique, qui prend une dimension proprement industrielle, et entreprennent une exploitation systématique de leurs vastes forêts, convoitées par la Marine royale. Cette dynamique d'ouverture, renforcée par l'afflux des visiteurs au monastère, ne se traduit pas pour autant par un recul des logiques religieuses : au XVIIe siècle, la dimension sacrée du territoire cartusien fait l'objet d'une réaffirmation constante, fondée sur les principes de la réforme catholique. Au XVIIIe siècle, l'évolution du regard porté sur la nature conduit à la construction de nouveaux systèmes de sacralisation de l'espace. L'exemple de la Grande Chartreuse met donc en évidence les connections et interactions entre les logiques sacrées et profanes sous l'Ancien Régime, chacune contribuant à structurer ce territoire.