La cécité et les aveugles dans la société française : représentations et institutions du Moyen-âge aux premières années du XIXe siècle
Institution:
Paris 1Disciplines:
Directors:
Abstract EN:
This historical study challenges the notion that the difficulties blind people face today in integrating themselves into society are unique to the twentieth century. It seeks to show the reciprocal, yet non-simultaenous influence between representations on the one hand and social treatment on the other, of blindness and the blind in france. The explorations of the sensualist philosophes and shifting attitudes concerning deficient senses, that lay at the heart of the eighteenth century, constitute a crucial period in the history of the blind ; the creation in Paris in 1785 by Valentin Haüy and the societe philanthropique of the world's first institution for the collective education of the blind of the indigent class, challenged the existence of a charitable institution that had existed since the thirteenth century : the hospital of the quinze-vingts, which favoured the persistence of old ideas that considered poor blind people incapable of becoming socially integrated through education and work. Also, in october 1800, the government, mindful of its budget and not willing to acknowledge the fundamental differences between the two institutions, ordered that the old and new be fused together, to create a modem charity workshop. The vagaries of post-revolutionary French politics, along with the persistence of old attitudes toward the blind, would not prevent the innovations born of french enlightenment from being diffused gradually throughout europe in the beginning years of the nineteenth century.
Abstract FR:
Cette étude historique part du constat des difficultés rencontrées aujourd'hui par les personnes aveugles pour s'intégrer dans notre société, et ce malgré la législation concernant les personnes dites "handicapées" élaborée tout au long du XXe siècle ; elle tente de mettre en évidence l'influence réciproque, mais non simultanée, entre représentations et traitement social de la cécité et des aveugles dans la société française, du Moyen Age aux premières années du XIXe siècle. En effet, si les interrogations des philosophes sensualistes et le basculement des sensibilités survenu au cours du XVIIIe siècle à l'égard des déficients sensoriels sont bien à l'origine d'un épisode crucial de l'histoire des aveugles : la création à Paris, en 1785, par Valentin Haüy et la société philanthropique, de la première institution au monde destinée à l'éducation collective des aveugles de la classe indigente, en revanche, la permanence d'une institution charitable fondée au XIIIe siècle par Saint-Louis : l'hospice des quinze-vingts, favorise pour sa part la persistance de représentations anciennes, postulant l'incapacité des aveugles pauvres à s'insérer socialement par l'éducation et le travail. Aussi, en octobre 1800, le gouvernement consulaire - soucieux d'économies budgétaires - peut-il arguer de l'existence et de l'ancienneté de cet établissement, pour ordonner que lui soit rattachée l'institution fondée par les philanthropes à la fin de l'ancien régime et nationalisée par les constituants en 1791 (dont il veut faire un atelier de charité). Un moment compromise par les aléas de la vie politique française, et par la persistance d'un établissement et de représentations sociales séculaires, l'innovation née en France de l'esprit des Lumières va pourtant se diffuser peu à peu en Europe dès les premières années du XIXe siècle, avant de connaitre un nouvel essor dans son pays d'origine.